TOUT EST DIT

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lundi 7 février 2011

Du bon usage de la TVA

La TVA été rehaussée de 16 à 19 % en Allemagne en 2007. Ce 1 er janvier, elle est passée à 20 % au Royaume-Uni, en augmentation de 2,5 %. Cette mesure devrait rapporter de l'ordre de 15 milliards d'euros à la Grande-Bretagne. La France devrait-elle procéder aussi à une hausse de sa TVA ? Le projet en est envisagé en France, mais exclusivement comme un moyen de réduire les cotisations sociales, de façon à favoriser la production nationale, qui supporterait moins de charges sociales, et de pénaliser les importations qui seraient assujetties à une TVA plus élevée. Faire payer la protection sociale des Français par les produits chinois importés en France en quelque sorte ! Il est certes vrai que la France est l'un des pays au monde qui impose les charges sociales les plus élevées, jusqu'à 80 % du salaire net, voire plus, avec, en 2008, des cotisations pour les employeurs et les employés s'élevant à 317 millions d'euros. Mais il n'est pas certain que la baisse de quelques points des cotisations sociales soit répercutée dans les comptes des entreprises. La TVA, quoi qu'il en soit, restera un impôt. Son augmentation pèsera dans tous les cas sur les contribuables, éventuellement sur ceux qui achèteront les tee-shirts chinois plus chers. Et son augmentation ne suffirait en aucun cas à compenser les surcoûts des charges sociales.

La TVA représente en France un produit net estimé en 2010 à 126,8 milliards d'euros, soit 49 % des ressources fiscales de l'Etat. L'augmentation de 1 point de la TVA à 19,6 %, à 5,5 % ou à 2,1 % représenterait respectivement 5,9, 2,6 ou 0,6 milliard d'euros de recettes supplémentaires. Ainsi, l'augmentation de 3 points, par exemple, de tous les taux de TVA permettrait de récolter 27,3 milliards d'euros, sous réserve encore des contre-effets en matière de consommation liés à cette hausse de la TVA. Mais ce produit supplémentaire compenserait à peine les allégements de charges sur les bas salaires (22 milliards d'euros, qu'il serait plus urgent de réduire progressivement, et le déficit annuel des régimes sociaux (7,4 milliards d'euros en 2011).

Il vaudrait sans doute mieux s'attaquer d'abord aux niches de TVA et/ou à l'uniformisation des taux. Le coût des niches fiscales relatives à la TVA est estimé à 17,2 milliards d'euros en 2010, dont 13 milliards dus au taux réduit de 5,5 % appliqué à certains secteurs, tels que les travaux immobiliers et la restauration. Cette application de la TVA au taux de 5,5 % est la parfaite illustration d'une mesure stérile obtenue par la seule et intense pression politique d'une profession.

Une quinzaine de pays appliquent en Europe la TVA au taux normal sur la restauration et il n'est pas démontré que les restaurants vivent moins bien dans les pays appliquant un taux normal à la restauration, ni que les habitants y soient plus mal nourris. Quant aux promesses de création d'emplois, elles sont restées quasiment vaines.

L'adoption de taux de TVA réduits dans certains secteurs ne répond donc à aucun intérêt général. Et la France (5,5 %) qui pratique, avec la Grèce (3,5 %), le plus bas taux de TVA européen sur l'hôtellerie pourrait aisément soumettre cette profession, comme quelques autres, à l'étiage commun. C'est d'ailleurs dans cet esprit sans doute que la commission des Finances du Sénat a suggéré cet automne de relever uniformément le taux réduit de TVA de 5,5 % à 8 %, aussi bien sur les nuits d'hôtel, les ventes à consommer de repas sur place et à emporter ou encore les travaux à domicile que sur l'édition, les oeuvres culturelles, les produits alimentaires... Une hausse de 2,5 points de la TVA à 5,5 % rapporterait 6,5 milliards d'euros supplémentaires par an.

Il ne paraît donc pas opportun d'augmenter la TVA pour compenser des charges sociales, ce qui serait financièrement peu efficace et à la mesure de la déresponsabilisation supplémentaire des assurés sociaux qu'un tel dispositif générerait en faisant supporter encore un peu plus leurs cotisations par l'impôt.

Mais il peut être utilement envisagé une hausse de la TVA dans le cadre de la réforme fiscale, dont le débat est annoncé pour le printemps 2011, et pour autant qu'il ne s'agisse pas d'un accroissement d'impôts mais d'un moyen de baisser d'autres impôts et d'optimiser notre système fiscal. Une telle réforme devrait toutefois commencer par la suppression des niches fiscales, en matière de TVA comme dans les autres domaines. A cette condition, une hausse de la TVA pourrait être un moyen de simplifier la vie des citoyens et de fluidifier la vie économique, en finançant par exemple une réduction drastique des droits d'enregistrements, la suppression de l'ISF et du bouclier, la limitation des impôts locaux dont la charge est devenue pour beaucoup insupportable, l'abaissement de l'impôt sur les sociétés à 30 % pour être plus compétitif en Europe... et une réduction générale de la CSG de 1 point pour compenser une éventuelle hausse de prix due à cette augmentation de la TVA...

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