TOUT EST DIT

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mercredi 8 décembre 2010

Petit retrait et grosses bulles


La date n’était pas mal choisie. Le 7 décembre rappelle le désastre naval de Pearl Harbor, le naufrage des cuirassés américains sous les bombes japonaises en 1941. Depuis plusieurs jours, le 7 décembre 2010 était annoncé par les disciples d’Éric Cantona comme le possible Pearl Harbor des banques. Encore eût-il fallu que l’amiral fût vu à la manœuvre.


On a bien cru qu’il conduirait l’abordage, quand un responsable de la BNP du village d’Albert, dans la Somme, affirma que le millionnaire allait retirer 1500 euros dans son établissement. Un million d’anciens francs, on en frissonne ! Le démontage de la finance picarde, sinon mondiale, semblait en vue.


Scrupule de dernière minute à donner l’ordre de grandeur de ses frais de goûter — l’apparition était annoncée pour l’après-midi — ou doute sur l’effet dévastateur du retrait ? Les médias n’ont rien découvert à Albert, et il n’y avait personne à Péronne. Or c’est là, toujours dans cette Somme peut-être choisie par ludisme verbal, que le fringant buteur de nos souvenirs a retiré un montant « symbolique ». Un avocat a été commis pour l’annoncer au monde, confirmant fortuitement que son client n’avait pas hésité à finir l’année en sacrifiant deux quinzaines d’intérêts.


Pourtant, Éric Cantona inspire bel et bien la finance, mais celle-ci copie surtout le joueur impétueux qui s’accrochait parfois avec un arbitre ou un juge de ligne. Ainsi, elle n’a guère apprécié l’exigence de règles, contrôles et sanctions, formulée par de nombreux pays après la crise de 2008. Et parfois concrétisée en partie.


Le problème est que la finance est aujourd’hui en mesure de mettre le nez de bien des États dans leur propre caca. Et elle ne s’en prive pas. À coups de notations, de hausses de taux d’intérêts, elle met en lumière les pays fragilisés par leurs déficits et leurs dettes, bulles dans la gestion de l’argent public dont le volume n’a souvent rien à envier à celles de la spéculation.


– En prônant, légitimement, la « moralisation » de la finance, les politiques ne savaient pas encore que leur discours fonctionnerait comme un boomerang.

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