TOUT EST DIT

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jeudi 28 octobre 2010

Exporter notre savoir-faire nucléaire

Les parlementaires français vont être amenés dans les semaines qui viennent à débattre sur la stratégie d'exportation de notre industrie nucléaire. Après l'échec de la proposition française de construction de centrales nucléaires dans le Golfe et le succès des Coréens, nouveaux venus sur la scène internationale, le président de la République a souhaité repenser l'organisation de l'industrie nucléaire et le rôle que doit jouer l'Etat. Notre industrie doit être en mesure de participer activement à la renaissance du nucléaire que l'on observe dans de nombreux pays. Ce mouvement pourrait se traduire par la construction de plus de 200 centrales dans les vingt ans qui viennent. Un rapport sur le sujet a été demandé à François Roussely, ancien président d'EDF. Ce rapport, remis en juin au chef de l'Etat, a été porté à la connaissance du public sous forme d'un résumé d'une vingtaine de pages ; il recommande d'organiser « l'équipe de France du nucléaire » sous la houlette d'un capitaine unique qui serait EDF. Ceci pourrait impliquer une montée en puissance d'EDF dans le capital d'Areva (EDF détient actuellement 2,4 % du capital) et peut être une participation d'EDF à la gouvernance d'Areva. Cette recommandation est fondée sur le fait qu'EDF opère le plus grand parc nucléaire du monde et dispose d'une longue expérience dans la gestion des centrales. Elle rejoint les ambitions de l'entreprise EDF qui souhaite assurer le leadership de l'industrie nucléaire, sur le territoire national et à l'étranger.

Cette organisation de « l'équipe de France du nucléaire » correspond à une forte volonté de pilotage étatique du nucléaire par le biais d'EDF mais, du point de vue industriel et international, elle ne semble pas du tout adaptée à une demande de technologie nucléaire qui est très diversifiée et qui doit être individualisée.

Du point de vue industriel, chaque entreprise a ses métiers. Areva conçoit et construit les centrales et maîtrise la chaîne du combustible. EDF opère un parc de centrales et peut vendre des services. Bien sûr, la construction du parc nucléaire a impliqué une forte coopération entre EDF et ses fournisseurs. On peut admettre qu'EDF intervienne, à la marge, dans la conception des centrales qu'elle commande pour elle-même mais on peut difficilement imaginer qu'EDF puisse participer, de près ou de loin, à la conception, à la vente et à la construction des centrales commandées par ses concurrents. Ce serait comme si British Airways passait par Air France pour commander un Airbus ! Par ailleurs, si EDF est la plus grande entreprise nucléaire du monde, les performances de ses centrales ne sont pas les meilleures. GDF Suez, Alstom et de nombreuses autres entreprises, y compris des entreprises financières, ont aussi leur rôle à jouer dans l'aventure nucléaire internationale.

Du point de vue international, chaque pays qui veut construire une centrale a ses propres caractéristiques, ses propres exigences, notamment sur la participation de sa propre équipe nationale. Un projet est souvent segmenté pour permettre d'élargir le choix des fournisseurs et des partenaires. La réponse à ces demandes implique de la concurrence mais des complémentarités, des actions de coopération, la création de consortiums appropriés, y compris avec des partenaires étrangers, selon des modalités à inventer pour chaque cas particulier. Dans certains cas, on peut comprendre qu'un pays charge EDF ou GDF Suez d'orchestrer la construction d'une centrale, mais ce n'est en aucun cas le modèle général. Donner à EDF le leadership de l'offre nucléaire française n'est pas de nature à favoriser cette nécessaire diversité. La renaissance du nucléaire dans le monde est un phénomène autrement plus complexe que la préparation d'un match de foot. L'équipe de France doit jouer sur ses expertises, sa diversité et ses complémentarités.

Bien sûr, une concertation plus forte doit être encouragée entre les différentes entreprises concernées. Des groupes de travail ont été constitués entre EDF et Areva. Une concertation similaire pourrait être menée avec GDF Suez. Chaque projet de construction de centrale nucléaire, surtout chez les nouveaux venus, a de multiples dimensions qui impliquent la participation de différents acteurs. L'Etat a un rôle de soutien, mais qu'il laisse aux opérateurs industriels le soin de négocier au mieux.

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