TOUT EST DIT

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mercredi 19 janvier 2011

Les enfants de la confiance

Etrange univers que la démographie ! Ici, la France est en plein boum. Elle ne connaît pas la crise, ni la déprime ni la lente asphyxie à laquelle elle semble trop souvent condamnée. L'an dernier, ses femmes ont accouché de 828.000 bébés. C'est le nombre le plus élevé depuis trente ans, bien plus proche du pic du baby-boom (878.000 en 1964) que du creux des années grises (711.000 en 1994). Un seuil symbolique a même été franchi : pour la première fois depuis 1974, les femmes ont en moyenne deux enfants (selon l'indicateur conjoncturel de fécondité). En une génération, le pays a ainsi dépassé les 65 millions d'habitants, soit une progression de 10 millions. Et, dans une génération, il sera plus peuplé que l'Allemagne, où la population décline depuis déjà sept ans.

Cette énergie vitale de la France s'explique par trois raisons majeures. La première est technique : il s'agit d'un décalage dans le temps. Ces dernières décennies, les femmes ont été de plus en plus nombreuses à occuper un emploi. Nombre d'entre elles ont décidé en conséquence d'avoir des enfants plus tard. L'âge moyen à l'accouchement a dépassé les 30 ans l'an dernier. Et la progression de la fécondité vient pour une bonne part des femmes de plus de 35 ans. La deuxième raison, elle, est politique. L'Etat continue d'encourager la natalité par toute une série de mesures, des allocations familiales aux crèches en passant par des réductions d'impôt. Les futurs gouvernants devront avoir cette donnée en tête quand ils devront faire des choix budgétaires déchirants.

La troisième source de notre énergie démographique est plus profonde : les Français ont tout bonnement envie d'avoir des enfants. Dans un pays en proie au doute, à l'horizon bouché, craintif d'un monde en plein changement, ce désir correspond à une envie de se projeter malgré tout dans le futur. Le sondage de la Fondation pour l'innovation politique auprès de jeunes de 25 pays, publié hier, le montre clairement : les jeunes Français sont à la fois parmi les plus pessimistes sur la situation de leur pays (25 % de satisfaits), les plus inquiets de la mondialisation (seulement 52 % la considèrent comme une opportunité) et les plus enclins à fonder une famille (47 %) et à avoir des enfants (60 %). Dans un univers vécu comme hostile, on se replie sur le cocon familial.

Il y a donc dans ce « natalisme » français le meilleur et le pire, l'espoir et la crainte. L'envie d'enfants constitue cependant d'abord un signe profond de confiance dans l'avenir. Il doit bien y avoir une voie de passage entre ce sentiment individuel et notre destin collectif, qui nous permettrait de sortir enfin de « la société de défiance ».

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