TOUT EST DIT

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mardi 7 décembre 2010

L'impôt élevé, un choix français

Les Allemands paient moins d'impôts sur le patrimoine que nous. Nous devons donc nous aligner. Les Espagnols et les Belges paient moins d'impôts sur le tabac que nous. Nous devrions donc nous aligner. Le monde entier paie moins de cotisations sociales que nous. Nous devrions donc, là encore, nous aligner. On se croyait en plein débat fiscal et on se retrouve dans l'exposition Mondrian qui vient de commencer à Beaubourg ! Objectif : alignement général par le bas. Au nom, bien sûr, du bon sens, de la compétitivité nationale et de l'avenir des buralistes.

Mais il y a là comme un problème. Du courage, mesdames et messieurs les gouvernants ! Osez révéler la dure vérité, plutôt que de faire miroiter une convergence qui se traduirait par des cadeaux fiscaux. Les Français continueront longtemps de payer les impôts parmi les plus élevés au monde. Il serait même logique que chaque taxe soit plus lourde chez nous qu'ailleurs. Pour une raison aveuglante : nous avons la dépense publique la plus élevée au monde après le Danemark et la Suède.

Centrons l'éclairage sur l'Allemagne, vers laquelle le président Nicolas Sarkozy veut fiscalement converger. La dépense publique y aura absorbé 48 % des richesses créées cette année, contre 56 % en France. Cet écart d'un sixième, soit 8 % du PIB, représente 160 milliards d'euros. C'est énorme. Comment donc imaginer la convergence ? La première solution est simple. La France applique le système de prélèvements sociaux et fiscaux de l'Allemagne sans rien changer à ses dépenses. L'Allemagne retournant vers l'équilibre budgétaire, la France maintiendrait au fil des ans un déficit de 8 % du PIB, le niveau de 2009-2010. Elle pourrait espérer remporter le titre de champion du monde du gouffre public. Mais jamais les investisseurs ne continueraient à boucher un trou pareil, même avec tout le savoir-faire de l'Agence France Trésor qui place les obligations émises par l'Etat français. C'est donc impossible.

Deuxième solution : la France transpose la fiscalité allemande en augmentant tous ses taux d'un sixième (l'écart entre dépenses publiques allemande et française) pour converger vers le même déficit budgétaire. Le taux de la TVA en Allemagne est de 19 % ? Il passerait en France à 22,2 % (contre 19,6 % aujourd'hui). Le taux marginal de l'impôt sur le revenu est de 45 % outre Rhin ? Il passerait à 52 % de ce côté-ci (au lieu de 41 %). Cette convergence-là ferait donc brutalement augmenter nombre d'impôts. Impossible aussi. Ce qui nous amène logiquement vers la troisième solution : la France ramène ses dépenses publiques au niveau allemand. Elle pourrait alors… supprimer la TVA si l'Union européenne n'imposait un taux minimal de 15 %. Ou abolir l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés tout en réduisant le déficit public de 3 % du PIB ! Mais quand on voit la difficulté du gouvernement à réduire la dépense publique de quelques petites centaines de millions, ou l'incapacité de l'opposition à proposer la moindre piste intéressante en la matière, il est permis de douter. La France est droguée à la dépense publique. Seule une violente secousse pourrait parvenir à la décrocher de sa seringue budgétaire.

Peut-être alors faut-il regarder d'autres modèles ? Comment fait par exemple le Danemark pour rester compétitif avec une dépense publique de 60 % du PIB et un déficit mieux contenu que le nôtre ? La réponse est d'une brutalité terrifiante : ces doux Danois matraquent le cochon de contribuable. L'impôt sur le revenu fait 25 % du PIB, contre à peine 7 % en France (sans la CSG, le chiffre français descend même à moins de 3 %). La TVA et les autres taxes sur la consommation en ponctionnent 15 %, moitié plus qu'en France. De quoi faire perdre n'importe quelle élection de par chez nous. Il faudra faire autrement.

Nos voisins montrent clairement que si nous voulons réduire durablement l'impôt (objectif sans doute souhaitable), il faut d'abord diminuer la dépense publique. D'autres pays y sont parvenus sans tomber pour autant en enfer, comme la Suède qui a diminué la sienne de près de 20 % du PIB en quinze ans. Mais si les Français estiment collectivement que les dépenses publiques doivent être maintenues, voire accrues, alors l'impôt augmentera. Toutes les convergences du monde n'empêcheront pas cette divergence-là.

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