mardi 7 décembre 2010
L'affaire WikiLeaks
L'affaire WikiLeaks est aussi intéressante par les réactions qu'elle suscite que par les révélations distillées dans la presse sur quelques épisodes des relations internationales. Elle pose, de façon massive, une question qui hante les démocraties : celle des limites de la transparence. Une analyse rapide des opinions exprimées permet de distinguer trois camps. D'abord celui du « tout dire », pour lequel la transparence en tous domaines et par tous les moyens est un idéal absolu. Ensuite celui, plus modéré, des défenseurs de la recherche d'information. C'est la position des cinq journaux qui publient les « fuites » : la question, disent-ils en substance, n'est pas de savoir si nous approuvons les méthodes de WikiLeaks ; mais puisque ces informations allaient tomber dans le domaine public, notre rôle était de les livrer à nos lecteurs, en leur apportant l'éclairage nécessaire. Le troisième camp, enfin - où se retrouvent la plupart des personnalités politiques qui se sont exprimées sur le sujet -, condamne l'ensemble de l'opération, avec plusieurs griefs : la mise en danger des personnes, l'atteinte portée aux intérêts du pays, la dose supplémentaire d'aigreur introduite dans les relations entre Etats… Reproches auxquels on peut ajouter un doute sur l'interprétation des messages diplomatiques qui forment l'essentiel des livraisons de WikiLeaks : par l'importance qu'on leur donne, ils semblent exprimer des options politiques fondamentales des Etats concernés, alors qu'ils ne traduisent souvent que des impressions personnelles, dans des contextes mouvants.
Le « droit au secret » existe pour les Etats comme pour les personnes, même s'il n'a pas les mêmes justifications : il ne s'agit pas de protection de la vie privée, mais d'efficacité et de sécurité. L'affaire WikiLeaks est sans doute moins nocive par les « fuites » diffusées aujourd'hui que par la chape de méfiance qu'elle risque de faire peser à l'avenir sur la politique internationale - et qui nuira davantage aux démocraties qu'aux régimes autoritaires, rompus à l'art de brider l'information.
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