Dissimuler son visage dans l'espace public constituera une infraction passible d'une amende pouvant aller jusqu'à 150 euros.
Qu'elles soient françaises ou touristes, Saoudiennes sur les Champs-Élysées ou immigrées: elles ne pourront plus porter le niqab dans la rue en France, à partir du 11 avril. Le compte à rebours vient d'être enclenché mercredi matin, par la publication au Journal officiel de «la circulaire d'application de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public». Le texte se veut sobre. «Car cette loi est un symbole fort, mais elle ne concerne qu'une minorité», rappelle-t-on à Matignon. Il n'y aura donc pas de traque aux quelque 2000 femmes portant la burqa.
Si une dame refuse de se découvrir dans un service public, on lui demandera de quitter les lieux. Si elle persiste, «la loi ne confère en aucun cas à un agent le pouvoir de contraindre une personne à se découvrir ou à sortir. L'exercice d'une telle contrainte constituerait une voie de fait et exposerait son auteur à des poursuites pénales. Elle est donc absolument proscrite», met en garde la circulaire, pour éviter les dérapages. «Les agents du service public doivent faire appel aux forces de l'ordre», rappelle-t-on à Matignon.
Concrètement, les policiers devront alors procéder à un contrôle d'identité de la personne entièrement voilée pour établir le «constat d'infraction». Si elle accepte de montrer son visage, alors elle recevra une convocation pour une audience devant un juge de proximité, chargé d'évaluer l'infraction. Il pourra proposer un simple stage de citoyenneté ou opter pour une amende allant jusqu'à 150 euros au maximum. Si la femme refuse d'ôter sa burqa lors du contrôle de ses papiers, alors elle sera emmenée au poste de police.
Les policiers que l'on dit réticents, craignant d'enflammer des quartiers déjà sous tension, «donneront la priorité à leurs missions urgentes. Mais s'ils croisent une femme entièrement voilée lors d'une patrouille, ils relèveront l'infraction, avec discernement», explique-t-on au cabinet du premier ministre.
Dans les commerces, les bars, les cinémas, les restaurants, les hôtels, chacun pourra décider de placarder les grands posters mis à disposition par l'État, qui rappellent que «La République se vit à visage découvert». Près de 100.000 affiches et 400.000 dépliants ont été imprimés, tandis qu'un site Internet fournit ce matériel à tous ceux qui le désirent.
Les gérants pourront demander aux clientes de se découvrir ou de quitter les lieux et recourir aux forces de l'ordre en cas de blocage… Tout comme ils pourront fermer les yeux. «Nous ne voulons mettre personne en difficulté et ce n'est pas aux citoyens de faire cesser cette infraction», explique-t-on au cabinet de François Fillon.
Rue, transports en commun, écoles et universités, commerces, cinémas, parcs, cafés… La circulaire détaille la notion nouvelle en droit «d'espace public». Les femmes en burqa pourront en revanche circuler dans des voitures privées, comme passagères. Il ne leur est pas interdit de conduire, à condition qu'elles puissent effectuer toutes les manœuvres rapidement et sans entrave… À Nantes, la conductrice en burqa avait contesté son amende et obtenu gain de cause… «mais il ne faut pas prendre cette décision pour une jurisprudence. En réalité, le procès-verbal de l'agent n'était pas assez précis», veut-on croire à Matignon. Il reviendra aux agents de juger de l'habilité d'éventuelles conductrices masquées, dans le respect du Code de la route. Enfin, dans les mosquées, la loi peut s'appliquer, «si des responsables du lieu le réclame», précise-t-on à Matignon.
En attendant les premiers cas, le ministère de la Ville est chargé d'une mission d'approche plus ciblée de ces femmes. Les préfets, sous-préfets à l'égalité des chances et délégués des préfets dans les quartiers, tout comme le réseau des femmes relais et les associations seront mobilisés pour aller au-devant des familles et relayer un message d'égalité homme-femme. Discrètement. Comme s'il ne fallait pas rallumer les braises du débat.
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