TOUT EST DIT

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vendredi 4 mars 2011

Renault : retour de bâton

On reproche parfois à juste titre aux journalistes de ne se fier qu'aux rumeurs. On pourrait adresser le même reproche aux patrons. Ce n'est pas parce qu'un fait semble probable qu'il l'est. Tout comme on ne devrait jamais se baser uniquement sur une hypothèse plausible pour rédiger un article, un dirigeant d'entreprise ne devrait pas se contenter d'être convaincu pour agir. Pour décider, il faut des faits. Des faits incontestables.

L'affaire d'espionnage qui secoue Renault le prouve. Même s'il est trop tôt pour dédouaner totalement les trois cadres mis en cause, tous les détails progressivement rendus publics tendent à affaiblir la position du constructeur automobile et à renforcer celle des accusés. La marque au losange n'a pas eu tort de s'inquiéter, mais elle donne rétrospectivement l'impression d'avoir agi à la fois trop vite et trop violemment. En cas de soupçons, il fallait enquêter, éventuellement mettre à pied. Pas forcément licencier pour faute lourde, en condamnant, ainsi, avant même d'avoir obtenu des preuves irréfutables.

En agissant dans ce qui s'apparente à de la précipitation et en manquant d'arguments face à ceux qui taxent le groupe d'amateurisme, Renault a pris des risques. Le principal est d'avoir fragilisé la direction du groupe, et donc l'entreprise elle même. Si les faits ne donnent pas très rapidement raison à Carlos Ghosn, le PDG, et Patrick Pélata, le DG, ceux-ci verront leur autorité s'affaiblir auprès de leur troupes. Or, une entreprise a ceci de commun avec une armée : pour avancer, elle doit faire confiance à ses chefs. Aujourd'hui, leur crédibilité est diminuée.

Au-delà de Renault, c'est même l'ensemble des entreprises qui pourraient se retrouver affaiblies. Car demain, dans une France si prompte à voler au secours des « faibles » contre les « forts », qui croira encore un patron accusant un salarié en cas de vol ou d'espionnage ? Même s'ils ne sont pas légion, les Kerviel existent. Le bénéfice du doute servira désormais leur cause.

Enfin, en accusant, même indirectement, la Chine d'être à l'origine de cet espionnage, Renault a peut-être joué contre les intérêts français dans ce pays qui fait figure de locomotive de l'économie mondiale.

A long terme, quelles que soient les conclusions de l'enquête, cette affaire ne devrait guère avoir d'impact sur les ventes de Renault. Si ses voitures sont bonnes, elles se vendront. L'évolution de l'image de ses dirigeants qui se sont exposés en montant en première ligne risque, elle, de souffrir beaucoup plus en fonction de l'issue de cette mauvaise histoire.

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