TOUT EST DIT

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vendredi 7 janvier 2011

Les comptoirs européens de la Chine

Les poches pleines de billets, Pékin fait son shopping. Depuis des mois, les responsables chinois sillonnent l'Europe. La raison première est simple. Avec près de deux mille milliards d'euros de réserves de change - soit plus que le Japon, la Russie, les États-Unis, l'Allemagne et la France réunis -, la Chine est actuellement le meilleur acheteur du marché. Tout l'intéresse : les échanges, les contrats, le savoir-faire, les infrastructures, les usines, les matières premières africaines, et même les dettes souveraines.

Après avoir financé la dette américaine au moment de l'explosion de leur industrie, à présent, les Chinois diversifient leur panier avec la dette européenne. Trois pays sont déjà en tête de liste. La Grèce, avec plus de quatre milliards de financements déjà actés. Le Portugal, qui devrait trouver son salut financier grâce à l'achat par Pékin de cinq milliards d'euros d'obligations d'État. Enfin, l'Espagne avec laquelle des discussions sont bien avancées. D'autres commencent à y penser, comme la Belgique, l'Italie ou la Hongrie. Si la gouvernance de l'euro ne donne pas, au premier semestre, des signes tangibles de redressement, c'est à Pékin que pourrait se jouer l'avenir de la monnaie unique.

Dans la planète financière, le fait ne bouleverse en soi aucun dogme, car ce type d'échanges et de croisements est courant. Après tout, la Chine, désormais deuxième puissance économique, entretient avec l'Europe des liens suffisamment forts (comme deuxième partenaire) pour que la santé financière du Vieux Continent concerne au premier chef l'empire du milieu. Soutenir l'euro, c'est pour Pékin épauler un acheteur de ses propres produits. Un poumon tout aussi vital que le poumon américain.

Sur le plan de l'influence politique, le phénomène est, en revanche, beaucoup plus inédit. Car, outre les bons du Trésor des pays européens, Pékin multiplie les investissements aux quatre coins de l'Europe. Un consortium chinois a emporté la mise, l'an passé, en Pologne, pour la construction d'autoroutes cofinancées par l'Union européenne. Des concessions des ports d'Athènes, de Naples et de Barcelone sont passées aux mains d'investisseurs chinois. Tout comme Volvo, en Suède, ou MG Rover en Grande-Bretagne. On pourrait multiplier les exemples d'acquisitions, notamment dans le domaine manufacturier.

Pékin doit écouler ses réserves, diversifier ses appuis mais aussi acquérir de nouvelles technologies. Ce sont les raisons de cette stratégie. La puissance financière chinoise n'a pas encore atteint les niveaux de ce que furent les puissances britannique, il y a un siècle, ou américaine, plus récemment. Et le fait n'est pas nécessairement à sens unique, si les Européens savent transformer l'ouverture à la Chine de leur marché en porte tournante vers le marché chinois.

Néanmoins, la fulgurance de cette montée en puissance impressionne. En trois ans, la Chine vient de décupler ses investissements à l'étranger, sans pour autant lever les nombreux obstacles qu'elle impose aux sociétés étrangères désireuses de s'y installer. Face à une Europe unie, qui émettrait par exemple des obligations communes, le rapport de force serait plus ou moins paritaire. Face à une Europe divisée, non seulement les taux sont plus avantageux pour Pékin, mais le cordon de sécurité tissé en Europe par la Chine pour sécuriser l'expansion de son économie pourrait se transformer en une nasse pour les maillons faibles de l'euro. Tout de go.

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