Vive de Gaulle ! Sans cesse, cette acclamation montait à nos lèvres, du fond de notre coeur, durant ces longues années noires de l'Occupation. De Gaulle, ce nom prédestiné à rétablir la France dans la liberté, à lui redonner son rang dans le monde après cette sinistre défaite qui l'avait abattue.
Vive de Gaulle ! C'était le cri de ceux qui ne se résignaient pas. Pourtant, nous ne connaissions pas cet homme. Nous ne l'avions jamais vu. Peu nombreux étaient ceux qui connaissaient sa voix. Et puis, quelques tracts largués par avion nous parvinrent. La photo du Général était encadrée d'une bordure tricolore et l'on pouvait lire, au verso, le fameux appel du 18 juin 1940 : « La France a perdu une bataille, mais elle n'a pas perdu la guerre... »
De Gaulle poursuivit le combat. Sa vision débordait largement les frontières de la France et même celle de l'Europe. Il avait immédiatement compris que la guerre, à travers les empires britannique et français, allait s'étendre au monde. Il avait pressenti les changements d'alliance entre l'Allemagne et l'URSS et l'entrée en guerre de la puissante Amérique.
Il avait affirmé sa foi dans l'héroïque Angleterre qui, presque désarmée, se dressait seule, alors, pour faire face à l'armée allemande au sommet de sa puissance.
L'un des plus grands
Sa foi en la France le rendait certain d'être entendu par les Français. Il savait pouvoir rallier autour de lui ceux qui voulaient poursuivre le combat. Il savait que, soumis à une occupation de plus en plus dure, les Français se rebelleraient un jour et que ceux qui collaboraient avec l'ennemi seraient de moins en moins soutenus. Et tout cela se produisit, en effet, mais à travers bien des vicissitudes. Cependant, de Gaulle, inébranlable, persistait et s'imposait de plus en plus aux Alliés comme un partenaire à part entière, malgré sa faiblesse et son isolement.
Il eut, un jour, la satisfaction de constater que les Français l'encourageaient de loin. Sa mère, réfugiée à Paimpont, en Bretagne, y mourut. Sa tombe était fleurie régulièrement par des mains inconnues. Une photo fut prise et lui parvint, ce qui lui fit dire : « Vous voyez, ils sont avec moi. »
De Gaulle était, pour nous, l'étendard de l'indépendance et de la liberté. Nous l'attendîmes durant quatre ans. Puis, il nous apparut aux balcons de nos hôtels de ville, au milieu du peuple de Paris, à Notre-Dame, sous une fusillade inexpliquée. Plus tard, ce furent les épisodes politiques, souvent dramatiques, jusqu'au départ définitif dans la solitude des rivages irlandais ; jusqu'au soir où il s'éteignit à la Boisserie, il y a quarante ans aujourd'hui. Le pays plongea dans la stupeur et la tristesse.
Nous sûmes alors que nous avions été contemporains d'un homme qui faisait partie des quelques grands personnages qui avaient fait notre histoire. Il fut sans nul doute, parmi eux, l'un des plus grands.
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