TOUT EST DIT

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lundi 7 mars 2011

Marine Le Pen, un projet farfelu

Longtemps libéral, le FN est devenu très interventionniste avec Marine Le Pen. Son projet économique est nationaliste et se présente comme socialiste. Il mord à droite sur certains sujets, et cherche à mordre à gauche. Et il repose sur des idées fausses.Un sondage place Marine Le Pen en tête du premier tour de l’élection présidentielle, à 23%, devant Martine Aubry et Nicolas Sarkozy. L’occasion d’analyser son programme économique. Pour être brutal, disons qu’il est assez farfelu, mais on a l’avantage de le savoir déjà. Le projet du PS est encore vague, celui de Nicolas Sarkozy n’est pas connu, mais on connaît déjà à peu près celui du Front national. J’hésite à écrire « farfelu » parce que c’est tomber dans le piège du FN qui se sert des critiques pour affirmer que l’establischment, les partis, les médias, sont contre lui.

Mais on sait un certain nombre de choses du projet économique, même si ce n’est pas la première des raisons pour lesquelles le FN séduit des électeurs. Ce qui est intéressant est que Marine Le Pen a donné un virage à ce projet, même un virage étatiste étonnant. Longtemps libéral avec Jean-Marie Le Pen, le FN est devenu très interventionniste. Dans son discours de Tours en janvier, Marine Le Pen a utilisé le mot Etat 46 fois. Ce projet est nationaliste et se présente comme socialiste. Il mord à droite sur certains sujets, et cherche à mordre à gauche.

Que propose-t-elle ? Il faut aller dans le concret. Le scénario économique est le suivant. La France sort de l’Union européenne et de l’euro. Le franc est réimprimé, avec une valeur de 1 franc = 1 euro. Il est fortement dévalué pour relancer la croissance. L’inflation importée (pétrole) revient du coup au galop et elle est même provoquée parce que la Banque de France crée de la monnaie pour rembourser la dette publique. Pour contrôler cela, la surveillance administrative des prix est rétablie. Comme les prix augmentent quand même, on baisse les impôts. Et l’Etat se finance en recentrant les aides sociales sur les seuls nationaux français. La boucle est bouclée.

Tout cela repose sur des idées fausses. La Grande-Bretagne, qui n’a pas l’euro, a été touchée par la crise. Marine Le Pen veut quitter l’euro avec l’Irlande, le Portugal, l’Espagne. Mais aucun pays ne le veut, et pas les Irlandais, qui ont pourtant renversé leur gouvernement. Croire qu’il suffit de bloquer les produits chinois à la frontière pour que tout aille mieux est court – même s’il y a des marges de manœuvre. Après avoir défendu la retraite à 65 ans, le projet reparle des 60 ans. Tout cela est électoraliste. Le FN dit que des économistes hauts placés sont d’accord, mais qu’on nous les montre.

Ces arguments rationnels ont peu de chance d’être entendu parce que le FN, en économie, prospère sur plusieurs terrains. D’abord sur l’absence totale de consensus apparent entre l’UMP et le PS, qui sont extrêmement durs l’un sur l’autre. Et qui, par ailleurs, pour garder ou accéder au pouvoir, usent et abusent de déclinisme sur l’état de la France. Le pessimisme nourrit les extrêmes. La réalité n’est pas rose, inutile de la peindre en noir.
Ensuite, le projet du FN s’oppose par sa simplicité apparente par rapport aux solutions des partis traditionnels qui sont toujours complexes. Il y a un raz le bol, une fatigue, de la complexité.

Enfin, le FN surfe aussi sur tous les ressentis, des PME contre les grandes entreprises, des artisans, des commerçants contre la finance, des salariés précaires contre la situation, etc. Tout cela montre que considérer que la crise est terminée est une grande erreur. Elle ne peut pas être passée par pertes et profits.

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