TOUT EST DIT

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vendredi 14 janvier 2011

Quatre contre-pouvoirs effacés

Avouons-le à la barre, ce matin : oui, l’idée d’un Défenseur des droits se défend.

Créer de toutes pièces un personnage puissant, à la tête d’une institution non moins puissante, capable d’être le super-avocat de tous les citoyens français face à l’injustice, la discrimination, la maltraitance ou encore aux abus de sécurité, c’était, sur le papier, un projet respectable.

La France ne pouvait que se féliciter de voir apparaître dans l’arborescence de ses pouvoirs l’équivalent d’un Ombudsman allemand, capable d’imposer son autorité de résistance face au rouleau compresseur de l’administration et de camper dans les vides du droit pour arrêter les assauts de l’armée des indignités invisibles ou silencieuses et toujours multiformes.

« C’est un progrès », clament ses promoteurs sur le ton de l’évidence. Pourquoi, alors, poser des réserves sur la voie de son avènement, ouverte par l’Assemblée nationale hier soir ?

Parce que le Défenseur des droits ne naîtra pas innocent. Le Parlement va lui donner la vie sur les ruines de quatre institutions délibérément sacrifiées pour être fondues dans un seul ensemble.

Quatre institutions, plus ou moins récentes, engendrées à des époques différentes et par des exécutifs ou des majorités variés, mais qui jouaient pleinement leur rôle dans la République.

Quatre contre-pouvoirs en parfait état de marche qu’on anéantit sans être bien certain que leur remplaçant unique, imaginé par un seul président, aura la même audace que chacun d’entre eux.

Le médiateur de la République, la Haute Autorité de lutte contre la discrimination et pour l’égalité, le Défenseur des enfants, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), avaient installé leur respect dans la durée. Année après année leurs travaux et leurs interventions, le plus souvent discrètes mais toujours opiniâtres, avaient patiemment érigé leur crédibilité. Et voilà que tout cela est mis à terre sans autre forme de procès !

Le regroupement de ces outils de levier risque fort de se traduire par une dilution de leurs influences respectives. Plus une administration est vaste - et ce sera le cas - et plus il est difficile de se l’approprier. Que ce soit pour être au service des enfants maltraités, des personnes discriminées ou des administrés malmenés, l’autonomie et la spécialisation de chacun des quatre organismes promis à la démolition, étaient autant de gages d’efficacité, de crédibilité et de rapidité. Avec une saisine simple, ces autorités accessibles étaient des forces tranquilles. Efficaces. Plus lointain et plus indirect, un Défenseur unique aura forcément moins d’agilité pour manœuvrer. Il sera fatalement plus politique. Les convoitises pour le poste confortent ce soupçon de superficialité annoncée.

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