TOUT EST DIT

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vendredi 14 janvier 2011

La pécheresse et le club des égoïstes

Le refus de l’UE d’intégrer la Roumanie dans l’espace Schengen signe l’échec de la classe politique locale, mais aussi d’une certaine idée de l’Europe, estime le quotidien Adevărul. 

Ne minimisons pas l'échec Schengen ! Nous ferions mieux d'admettre que, depuis les dernières années du règne de Ceauşescu et les "minériades" du temps de Ion Iliescu [l’entrée des mineurs dans Bucarest pour réprimer des manifestations en 1990], jamais la Roumanie n'a souffert d'un tel manque de crédibilité sur la scène européenne. 

Comment en sommes-nous arrivés là ? C'est simple. Je pensais que, une fois admis dans le club, nos engagements étaient devenus facultatifs – après tout, on ne pouvait plus nous mettre dehors.
Après le 1er janvier 2007, les dirigeants politiques de la Roumanie – le président Băsescu et ses alliés, le Premier ministre de l’époque, Călin Popescu-Tăriceanu, mais aussi les autres dirigeants de l'opposition – ont délaissé le projet européen pour se consacrer aux règlements de comptes internes. Ils ont comploté pour suspendre le chef de l'Etat et se sont jetés à corps perdu dans des campagnes électorales vides de contenu, mais démesurément coûteuses.
Le président, en particulier, s'est lancé dans des déclarations spectaculaires, à usage interne, qui ont irrité nos partenaires européens. La Roumanie s'est laissée dériver au gré du courant et a heurté la crise tel un Titanic heurte l'iceberg. 

Reconstruire notre destin en Europe
Qui prend encore la peine d'observer les changements en Europe ? Sous la pression de la crise économique et de tendances anti-immigration de plus en plus fortes, les Etats puissants de l'Union sont devenus égoïstes et cyniques. L'expansion, l'intégration et la monnaie unique sont maintenant les coupables désignés par un nombre croissant d'électeurs occidentaux, inspirés par le discours d'une extrême droite en pleine ascension.
Les partis traditionnels de centre-droit, au pouvoir dans la plupart des Etats puissants de l'Union, font de plus en plus de concessions à l'extrême droite. Ils craignent de subir le sort des sociaux-démocrates, auxquels les formations radicales de gauche ont arraché de nombreux électeurs, sur fond de crise et de mesures d'austérité.
Mais avez-vous remarqué que les Etats les plus hargneux envers la Roumanie sont dirigés par des partis de la même famille que les hommes au pouvoir à Bucarest? Leurs leaders cherchent à montrer aux électeurs qu’ils punissent les "coupables" des problèmes de l'Europe. La Roumanie, la pécheresse, est la victime parfaite. 
En effet, c'est un grand danger d'introduire des critères politiques, subjectifs, là où les aspects techniques devraient avoir la priorité – c'est le cas pour l'adhésion à l'espace Schengen.
Si demain le jugement s'étendait aux fonds de l'UE, nous serions perdus ! Et l'Union elle-même est en danger. Une Europe dans laquelle les règles sont remplacées à loisir par les diktats des intérêts des puissants est une Europe de division et de confrontation, pas de paix et de prospérité. L'histoire l'a déjà prouvé.
Des hommes d'Etat doués de vision auraient senti bien à l'avance ces évolutions dangereuses et auraient tout fait pour que leurs effets soient minimes pour la Roumanie. Mais nous pouvons constater ce qu'ils ont fait. Et nous devrons bâtir sur cette réalité lorsque nous déciderons de nous remuer, nous épousseter et commencer à reconstruire notre destin en Europe.



Contrepoint

La chant des sirènes nationalistes

Le report de l'entrée de la Roumanie dans l'espace Schengen a suscité un sursaut d'orgueil national dans la classe politique et certains journaux. "Nous sommes Roumains", affirme ainsi un éditorialiste du Jurnalul Naţional reprenant une chanson folklorique nationaliste. "Ce qui est bien", ajoute-t-il. "C'est mon opinion. Et celle de quelques autres, les non-adaptés aux chants des sirènes de l'espace Schengen." "Il ne s'agit pas du report de notre entrée dans l'espace Schengen, mais du fait que nous n'appartenons pas à cet espace", explique-t-il. "Qu'est-ce que je veux, au fait? Me sentir en France comme dans la cour de mon immeuble? En Italie comme dans ma chambre à coucher? En Allemagne comme dans mon salon?" "Ca ne marche pas, mes frères, ça ne marche pas, écrit le journaliste. Parce que nous sommes Roumains. Dans Schengen ou pas, nous sommes les mêmes. Et ça c'est bien. Je me sens à l'aise avec ma nationalité. Ca veut dire également que je peux dire exactement ce que je pense de nous, tout comme des Bulgares, ou, pourquoi pas des Autrichiens." Citant une autre phrase de la chanson folklorique, il conclut que "nous sommes les maîtres ici", tout en ajoutant : "Et nous avons élu des représentants de merde."

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