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vendredi 28 janvier 2011

Peter Oppenheimer : « L'inflation n'aura qu'un impact modéré sur les marchés européens »

Le responsable de la stratégie Europe de Goldman Sachs analyse ses prévisions pour le marché européen et explique sa prudence sur le CAC 40. Interview.

La crise des dettes souveraines est-elle derrière nous ?

Non. Les inquiétudes sur les dettes vont probablement encore peser sur le marché, alors que plusieurs pays ont des levées importantes à faire dans les prochains mois. Les craintes sur le financement pourraient encore créer de la volatilité et des turbulences sur le marché, au moins au premier trimestre. C'est pourquoi nous privilégions actuellement, dans une allocation globale, les Etats-Unis et le Japon. Toutefois, la perception du risque a changé, comme en témoigne la progression des marchés en ce début d'année. A chaque étape de la résolution de la crise, la Bourse monte. Une analyse sur longue période montre d'ailleurs que les marchés où il y a des ajustements budgétaires importants ont tendance à « surperformer » au cours des trois à cinq ans qui suivent, en partie parce que les investissements privés et les exportations ont tendance à s'améliorer.

Quels sont les risques qui menacent encore les marchés ?

Des craintes ont été levées alors que les investisseurs entrevoient une résolution des problèmes. Mais ils attendent davantage de clarifications sur les banques, sur la taille et la portée du Fonds européen de stabilité financière. La Banque centrale européenne (BCE) devrait opérer un tour de vis monétaire en 2011, ce que le marché a commencé à intégrer. Vu les taux bas, un relèvement modéré ne devrait pas empêcher la Bourse de grimper, dans le court terme, à condition que les problématiques de liquidités pour les Etats et les banques aient été résolues.

Et la montée de l'inflation ?

C'est un phénomène qui concerne surtout les marchés émergents, qui n'aura qu'un impact modéré sur les marchés développés. Le secteur de l'alimentation, les distributeurs, la pharmacie en Europe sont les plus corrélés -et affectés négativement -par la hausse des prix des matières premières.

Comment voyez-vous donc évoluer le marché européen ?

Nous prévoyons un Stoxx 600 à 340 points en fin d'année, soit une progression de 23 % par rapport au cours du 31 décembre et de 26,5 %, si on y ajoute les dividendes. Cette prévision est soutenue par une accélération de la croissance mondiale. Nos économistes anticipent 4,7 % de hausse du PIB, soit au-dessus du consensus de 4,1 %. Dans cet environnement porteur, les entreprises européennes devraient voir leurs revenus et leurs profits augmenter. Les bénéfices par action devraient croître de 25 % en 2011, puis de 18 % en 2012. Ce sont là aussi des estimations au-dessus du consensus (respectivement 15 % et 12 %). Les marges des entreprises devraient retrouver leur pic de 2007 à la fin de l'année.

Quels seront les autres moteurs de la hausse ?

La hausse sera essentiellement portée par les profits : nous ne prévoyons pas une expansion des multiples de valorisation. Mais le marché bénéficiera de plusieurs autres soutiens, notamment les dividendes et les fusions-acquisitions, qui devraient s'accélérer compte tenu de l'abondance de cash dans les bilans des entreprises. Enfin, une hausse des taux peut être le reflet d'anticipations d'une plus forte croissance économique, d'un environnement positif pour les actions. Un taux allemand à 10 ans autour de 3,3 % n'est pas incompatible avec une progression des actions.

Quelles places privilégiez-vous ?

Nous avons une préférence pour les indices du nord de l'Europe : le DAX, à Francfort, qui est l'un des plus cycliques, un pan de la cote qui devrait se distinguer. Nous avons également adopté une surpondération sur le Footsie 250, à Londres, qui devrait bénéficier d'une reprise dans les investissements mondiaux à travers ses valeurs industrielles ; l'OBX, à Oslo, qui profite d'un prix élevé du pétrole, et enfin l'OMX, à Stockholm, poussé notamment par son exposition aux marchés émergents. Nous sommes « neutres » sur l'Ibex 35, à Madrid, du fait de sa valorisation attractive. Enfin, nous sommes prudents sur les places de Milan et de Zurich mais aussi sur le CAC 40.

Pourquoi cette prudence à l'égard du marché parisien ?

Nous avons adopté une sous-pondération sur l'indice parisien, qui a un levier plus faible au cycle économique et qui bénéficie moins que ses homologues de la reprise. Ses principaux poids sont le pétrole et gaz (15 %), les banques (13 %) et la santé (10 %), alors que nous favorisons plutôt les valeurs cycliques.

La forte différenciation entre les marchés va-t-elle perdurer ?

Cette tendance devrait perdurer. La performance économique d'un pays en relatif par rapport aux autres et la proportion de sociétés exposées aux marchés émergents -en forte croissance -devraient être les principaux déterminants de l'évolution des indices. En 2010, la dispersion entre les performances avait nettement augmenté. Pour la première fois depuis la création de l'euro, les choix géographiques avaient été plus importants que les choix sectoriels.

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