TOUT EST DIT

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vendredi 3 décembre 2010

Le prévisible, l'incertain et l'inconnu


Ce sont les trois mots clefs pour analyser rigoureusement la situation et les mesures de politiques économiques à prendre. Cela vaut pour l'économie mondiale, pour celle de l'Union européenne et bien évidemment pour la France. C'est donc à partir d'une analyse soigneuse des faits, établissant une frontière précise entre ces trois territoires, le prévisible, l'incertain et l'inconnu que l'on peut délimiter les domaines d'actions possibles, puis analyser les avantages et inconvénients de toute décision. C'est également pour cela qu'il est tout aussi important de saisir les origines de la crise que nous vivons depuis 2007, comprendre le déroulement de ces trois dernières années, percevoir précisément la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui et tenter, sans approximations excessives, de dessiner les contours des semestres et années à venir et les moyens d'infléchir, s'il en est besoin, le cours des choses.


Il y a d'abord ce qui est connu. Fondamentalement, la crise même si elle a éclaté dans la sphère financière, est, comme toujours à l'origine liée au monde réel. Elle correspond, en effet, au transfert, extraordinairement rapide et violent, d'activités, souvent industrielles, des pays de l'OCDE vers les pays émergents. Certains pays ont plus souffert que d'autres, parfois par manque de lucidité, souvent par manque de réactivité. C'est sans nul doute le cas de notre pays, du moins si on le compare à notre grand partenaire allemand. Il y a évidemment ce qui est imprévisible car aucun des dérèglements majeurs de l'économie mondiale n'est réellement réglé : désindustrialisation, excès de liquidité, poursuite du désendettement affaiblissant la croissance, variabilité forte des prix des matières premières.


Tout cela a conduit à plaider pour la création d'un G20 qui aurait pour objectif de réguler l'économie mondiale, notamment dans son versant financier et l'on ne peut que se réjouir du fait que la France soit en charge de ce G20 en 2011.


Cependant, il ne faut pas négliger les risques de l'inconnu, baptisés improprement « guerre des monnaies ». Si nos partenaires (Etats-Unis, Royaume-Uni, Japon, Chine) continuent à mener des politiques monétaires hyperstimulantes, empêcher l'appréciation de l'euro sera impossible, sauf si la Banque centrale européenne se met à accumuler une montagne de dollars, ce qui serait dangereux et indésirable.


Si l'on prend le cas de la France, il est nécessaire d'élaborer des politiques économiques adaptées tout particulièrement dans le timing. Et tout cela doit se faire dans un environnement macroéconomique difficile avec une dette publique à résorber, sans véritable degrés de liberté, si ce n'est de faire évoluer la réparation des revenus.


Tout cela prend du temps, beaucoup de temps, les conséquences sont connues, la croissance aux Etats-Unis ne dépassera pas les 2 %, en Europe 1,5 point. La vraie incertitude se situe dans des prévisions de durées : 2012-2013 ? Sûrement pas avant. Tout dépendra évidement de l'impact des resserrements budgétaires et de l'efficacité des politiques monétaires mises en oeuvre par les banques centrales. Mais quittons le domaine relativement confortable de ces zones grises pour rentrer dans l'inconnu. La liste des interrogations est longue et impressionnante et toute politique économique doit se conformer à cette impuissance première : nous ne savons pas ce que sera la répartition des activités productives, donc l'emploi, à cinq ans dans nos pays.


Dans une période de rupture aussi significative, l'exigence est de donner la priorité aux éléments de compréhension pour bâtir des politiques économiques efficaces. Par exemple, comment inciter le travail, l'innovation, l'épargne de long terme ? Et puis, aujourd'hui, les problèmes fiscaux sont traités isolement ou de manière très approximative par des positions simplistes où l'on oppose le confiscatoire au « y'a qu'à ». Un autre point, tout aussi urgent et parfaitement inconnu, concerne les effets du vieillissement, effet négatif si on le prend à travers les prélèvements associés aux retraites et à la santé et effet positif si l'on pense que les seniors peuvent être productifs et que cette nouvelle répartition démographique est source de nouvelles activités.


Il est définitivement urgent de savoir ce qu'on sait et ce qu'on ne sait pas.

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