TOUT EST DIT

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mardi 4 janvier 2011

35 heures, durée létale

Le cadavre des 35 heures bouge encore. Même largement privé de sa capacité de nuisance, la relique barbare des années Aubry continue d'effrayer. En proposant de lever ce verrou légal unique posé, en 2000, sur la durée du travail des entreprises de plus de 20 salariés par l'ex-ministre du gouvernement Jospin, le député socialiste Manuel Valls ne sème pas seulement l'émoi à gauche, il réveille, par contrecoup, au sein de l'UMP, un faux débat entre des « sociaux » qui jugent bien suffisant le détricotage accompli des 35 heures et des « libéraux » décidés à obtenir l'abrogation d'un symbole toujours si nuisible à l'économie française.

Faux débat car si beaucoup a déjà été fait, beaucoup reste à faire, plus tard. Après deux lois de réformation votées avant 2007, après, surtout, deux autres lois de réforme votées depuis 2007 - l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, suivie de leur décontingentement -, que reste-t-il des 35 heures ? La trace d'un plafond qui n'en est plus un, la réalité d'un plancher à partir duquel se déclenchent les heures supplémentaires majorées, et des compensations financières versées aux entreprises - pour probablement une vingtaine de milliards, fondus dans l'enveloppe globale des allégements de charges.

Grâce à ces baisses de cotisations, ruineuses pour l'Etat, grâce aux efforts de productivité réalisés dans la douleur par les ouvriers et dans l'abnégation par les cadres, l'économie française a fini par surmonter le traumatisme de cette hausse brutale, massive, du coût du travail qu'a représenté le passage aux 35 heures sans réduction de salaire. Il lui a fallu dix ans pour le faire, mais elle y est parvenue, non sans stigmates car, pendant ce temps, les entreprises allemandes, elles, ont repris un avantage décisif dans la course à la compétitivité européenne.

Avec le sentiment d'avoir tourné cette pénible page, les entrepreneurs français ne semblent pas désireux d'exploiter les opportunités de renégociation qui leur sont offertes depuis 2008. Sans doute la crise les a-t-elle incités à la retenue. Mais, avec son cortège de vieux démons, la force immuable du symbole reste un puissant repoussoir.

Analogues, de ce point de vue, à l'ISF, longtemps vidé en vain de sa substance, les 35 heures, durée létale, demeurent l'un de ces astres noirs qui assombrissent l'image de la France. Ministre des Affaires sociales, Xavier Bertrand, a raison de souligner l'immense difficulté qu'il y aurait à revenir à 39 heures sans baisser les salaires réels. Mais la vivacité intacte du débat provoqué par les 35 heures montre la nécessité, après les avoir neutralisées, de sortir de ce vieux cadre imposé pour penser autrement le temps de travail. Avec ou sans durée légale. Ce n'est pas un débat pour une fin de quinquennat, mais pour une présidentielle.

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