On se demandait vraiment où elle était passée. Et on l'a retrouvée un dimanche matin dans le journal. C'est sa façon à elle de dérouter, Martine. Elle a pris un malin plaisir à prendre l'exact contre-pied de son ancienne - et future ? - rivale. A l'insolence de Ségolène Royal, la première secrétaire du PS a répondu par l'indifférence. Au moins apparente. Commencé à Reims, le bras de fer politique entre ces deux femmes déterminées est décidément aussi musclé qu'un mano a mano entre deux costauds. C'est sûr : aucune ne lâchera l'affaire.
Ce n'est pas seulement une rivalité d'ambitions qui les oppose, mais une contradiction de méthode. A l'impatience revendiquée de l'une répond la patience calculée de l'autre. C'est aussi une question d'ordre des choses : l'une place la candidature avant le programme et l'autre l'inverse. C'est enfin une histoire de tempérament : quand la présidente de Poitou-Charentes fonçait à Paris pour se placer, la maire de Lille était loin des caméras, dans sa ville, pour s'occuper officiellement des pauvres et du plan grand froid. Comment être la plus proche du peuple, n'est-ce pas ?
La scénarisation de l'affrontement à la fois feutré et transparent de ce duo infernal a quelque chose de cinématographique. On sait que l'une des deux n'y survivra pas. Mais avant l'épilogue, quelle sera la séquence suivante ? Le problème, c'est qu'il n'y a pas de place pour deux versions.
Sur le papier, le calendrier tranquille de la première secrétaire parait posé et rationnel. Mais s'il veut délibérément échapper aux inévitables échauffements de la course à 2012, il repose aussi sur un périlleux déni des passions. Un pari de la sagesse un peu inconscient quand chacun peut constater tous les jours que la campagne présidentielle a déjà commencé. Car chaque retard sur l'adversaire UMP pourra se payer cher. Les socialistes peuvent-ils prendre le risque de rééditer le calendrier infernal qui a été l'une des causes du naufrage de leur candidate en 2007 ? Il ne suffira pas de prétendre réinventer l'histoire pour qu'elle ne se répète pas.
La partie la plus ingrate du film n'est pas encore montée. Martine Aubry s'est engagée à mettre des moyens de financement en face des projets d'égalité de son parti - à combler ces blancs qui, jusque là, les ont décrédibilisés. Toujours au futur. Il va falloir le présent. Passer à l'acte. Maintenant. Les appels d'un Manuel Valls à dire la vérité sur les épreuves qui, de toutes façons, attendent les Français, ont-ils seulement une chance d'être entendus dans une compétition féroce où les prétendant(e)s tenteront de s'arracher l'étiquette « de gauche » pour empocher le morceau ? L'appétit tranchera dans le vif plus rapidement que prévu. Préparez vos mâchoires.
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