TOUT EST DIT

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lundi 6 décembre 2010

Si Cantona était pris au sérieux…

Il y a 779 milliards d’euros sur les comptes des Français. Le scénario de l’impossible conduirait à l’effondrement des banques et à leur propre ruine.

Quatre-vingt-dix-huit pour cent des ménages possèdent un compte en banque, le taux le plus élevé d’Europe, pour un total de 269 milliards d’euros. Tous les Français détiennent au moins un livret de caisse d’épargne ; sur l’ensemble s’amassent 167 milliards d’euros. A quoi s’ajoutent les différents autres livrets, dont l’épargne logement. Au total, selon la Banque de France, ils pèsent 510 milliards d’euros.
La petite plaisanterie d’Eric Cantona, reprise et amplifiée par d’autres plaisantins du Web, mais aussi par beaucoup de ceux qui exècrent, parfois à bon droit, l’arrogance du système bancaire, porte donc sur la modeste somme de 779 milliards d’euros !
Il est vrai que les comptes de beaucoup de ceux qui veulent « faire trembler le système » ne sont sans doute pas bien garnis, quand ils ne sont pas à découvert. C’est d’ailleurs ce qui explique leur décontraction. Quant à ceux qui ont de l’argent, fruit de leur épargne, protection contre les aléas de la vie, la leur et celle de leurs proches, préparation de leur retraite, etc., ils n’ont aucune envie de se prêter à ce jeu suicidaire !
Envisageons pourtant un scénario où l’appel de Cantona serait entendu. On sait que les ratios exigés des banques françaises les obligent à détenir dans leurs comptes à peu près 8 % des sommes qui leur sont confiées, tout le reste étant réinjecté dans le circuit sous forme de prêts aux entreprises et aux particuliers. C’est le ratio Cooke.
En théorie, il faudrait donc que 8 % du total des comptes soient vidés pour mettre la banque en faillite. En réalité, il suffirait de beaucoup moins d’activistes. Parce que les fonds propres ne sont pas instantanément liquides. Le capital d’une banque ne se transforme pas en billets, stockés dans ses coffres et disponibles à tout moment.

Il n’y a plus guère de liquide

Du « cash », en fait, il n’y en a guère, en dehors des distributeurs automatiques. Certaines agences n’ont même plus de caisse. Dans les autres, les retraits en espèces sont souvent limités à 1.000 €. Au-delà, l’opération ne peut se faire qu’avec un préavis, parfois de plusieurs jours. Au-dessus de 5.000 €, la banque doit demander les raisons du retrait et l’usage qui sera fait des fonds. En cas de doute, elle doit prévenir Tracfin, le service qui traque le blanchiment d’argent.
En temps normal – c’est-à-dire avant la crise financière –, toute proposition de retrait collectif n’aurait provoqué qu’un éclat de rire. Mais aujourd’hui la confiance dans le système financier s’est transformée en défiance vis-à-vis des banques en général. Moins marquée cependant vis-à-vis de la sienne, comme le montrent les sondages. Dans ce nouveau contexte, plus de quoi rire.
Revenons donc au scénario de l’impossible : mardi 7 décembre, une centaine de milliers de Français demandent à vider leurs comptes. Leurs banques ne peuvent pas leur fournir l’argent dans l’immédiat. Les journaux télévisés s’en emparent. La panique gagne. Par effet boule de neige, M. et Mme Pétochard, qui stockent le sucre et l’huile à la moindre occasion, vont à leur tour demander leur argent, pour le glisser sous leur matelas. Les banques se retournent vers la Banque de France, qui fait tourner à fond la planche à billets. C’est insuffisant. Le système est par terre.

Pire qu’en 1929

Et les banques sont ruinées. Avec des conséquences beaucoup plus graves que lors de toutes les précédentes crises financières. On ne parlerait alors plus d’effondrement de la Bourse, d’arrêt de tout crédit aux entreprises et aux particuliers, mais de retour au troc pour manger, boire et dormir, les seules fonctions vitales ! Quand on sait quelles ont été les conséquences de la crise de 1929 – Hitler et la Seconde Guerre mondiale –, on imagine quels seraient les effets de la ruine complète des banques et de leurs clients !
Heureusement, même aujourd’hui, il n’y a aucune chance que la foucade d’Eric Cantona soit suivie du moindre effet. Le footballeur est drôle, mais irresponsable. Ce qui n’enlève rien à la sympathie qu’il peut susciter.

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