mercredi 15 décembre 2010
Fillon fait de la corde raide
Cette fois, « il » n'est pas venu au conseil national de l'UMP. Il n'a pas départagé Brice Hortefeux, qui estime disproportionnée une décision de justice visant des policiers, et Michel Mercier, le garde des Sceaux, qui refuse de commenter la même décision de justice. On ne l'a pas entendu, ni ses conseillers, s'exprimer sur le respect de la séparation des pouvoirs. Cette fois... Nicolas Sarkozy a laissé faire François Fillon.
Chaque jour qui passe confirme que le Premier ministre, fort de sa popularité, s'est bien rendu indispensable dans le dispositif mis en place d'ici à 2012. Qu'il s'agisse des questions sécuritaires, des équilibres institutionnels, des rivalités ministérielles ou de la bonne marche de l'UMP, terrains sur lesquels le Président était omniprésent, François Fillon s'avance de plus de plus.
Samedi, à l'UMP, il mettait en garde Jean-François Copé, l'incitait à ne pas trop s'en remettre à des experts pour traiter des fondements de notre existence nationale. Lundi, devant les préfets, il appelait chacun à la raison, notamment le ministre de l'Intérieur. Hier, devant les parlementaires, à qui il doit en partie sa reconduction, il se faisait conciliateur entre policiers et magistrats, et s'offrait même le luxe ¯ chose rare chez les politiques ¯ de faire son mea culpa pour avoir dérapé sur la neige.
L'important n'est pas que François Fillon soit un peu plus Premier ministre ou que Nicolas Sarkozy devienne un peu plus Président. L'important, c'est de comprendre le message qui sous-tend cet ajustement des rôles : son camp ne gagnera qu'uni et Fillon est le mieux placé pour rassembler, du centre à l'extrême droite.
La première inconnue s'appelle Marine Le Pen. Ses scores, à la télévision et dans les sondages, font craindre à certains un autre 21 avril, c'est-à-dire un Front national présent au second tour de la présidentielle. Malgré quelques élections locales favorables, le pouvoir ¯ mais aussi, d'une certaine manière, la gauche ¯ est bousculé par une extrême droite que l'actualité abreuve d'arguments sécuritaires ou protectionnistes. Les angoisses nées de la crise et les amalgames entre la couleur de la peau, la religion et la délinquance compliquent singulièrement la réponse du pouvoir.
Outre le fait d'ignorer jusqu'où ira Dominique de Villepin, la seconde inconnue n'est autre que Jean-Louis Borloo. Depuis son échec à reprendre Matignon à François Fillon, les centristes cherchent un sauveur. Jeudi dernier, profitant du 105e anniversaire de la séparation des Églises et de l'État, l'ex-ministre de l'Environnement a fait un tabac en exposant, avec une hauteur très présidentielle, sa vision de la République. Personne ne le croit trop capable de jouer le mécano des centres, mais beaucoup s'interrogent sur ses intentions : envie de revanche ou rabatteur de voix pour Nicolas Sarkozy ?
D'un côté, François Fillon doit donc tenir bon sur la sécurité et l'immigration. Jean-François Copé a d'ailleurs annoncé, sur indication de l'Élysée, que le débat sur l'identité referait surface. De l'autre, le Premier ministre doit donner des gages au centre sur la laïcité, l'éducation, la famille, la justice fiscale, l'assimilation des immigrés, le financement de la dépendance.
Heureusement que le poids de la popularité aide à trouver de l'équilibre. Car ça s'appelle faire de la corde raide.
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