Les nostalgiques ne sont plus les seuls à penser cela. De plus en plus d’adeptes des calculs froids viennent grossir les rangs des eurosceptiques parmi lesquels ont retrouve des économistes, des managers et des chefs d’entreprise.
Pour Volker Nitsch, professeur à l’université technique de Darmstadt qui a étudié l’effondrement d’unions monétaires dans l’histoire, "la probabilité de voir un pays sortir prochainement de la zone euro est de 20%".
Jusqu’à présent, seuls des étrangers osent publiquement parler du mark. Le célèbre économiste américain, Barry Eichengreen, a récemment déclaré que l’Allemagne faisait partie des rares pays européens pour lesquels la réintroduction de leur ancienne monnaie ne s’accompagnerait pas d’une catastrophe financière.
Des obstacles techniques surmontables
Que signifierait le retour du mark ? La première chose est de savoir si l’Allemagne pourrait prendre une telle décision. La question fait sourire Volker Nitsch. "Aucun problème. Il y a déjà eu suffisamment de violations des traités". Il suffirait d’une autorisation du Parlement ou du chef du gouvernement.Les obstacles techniques n’ont eux non plus rien d’insurmontables. Pour créer une nouvelle monnaie, il faut une banque d’émission et des machines pour imprimer les nouveaux billets et fabriquer les nouvelles pièces. Mais là n’est pas le problème. La véritable question concerne les conséquences économiques d’une sortie de l’euro.
L’évolution des taux de change joue un rôle primordial. Il est probable que dans un premier temps, le mark augmenterait sa valeur, environ le double. Les produits allemands seraient nettement plus chers à acheter pour les pays étrangers.
A long terme, nous exporterions moins à nos voisins européens. Et l’histoire montre que la fin d’une union monétaire se traduit toujours par une réduction des échanges commerciaux entre anciens partenaires.
Mais est-ce problématique? Premièrement, les exportations allemandes ne devraient pas diminuer trop longtemps. Lorsque notre monnaie est forte, les matières premières sont plus abordables. Résultat, les produits allemands peuvent être fabriqués à moindre coût et vendus meilleur marché.
Deuxièmement, les exportations ne sont pas le seul objectif de notre économie. Le retour du mark aurait un effet positif sur la consommation, ce qui devrait également soutenir l’économie.
La fin de l'euro ou le début de la pire crise financière de l'histoire
D’autres aspects de cette décision pourraient néanmoins se révéler très coûteux. Les Allemands ont – souvent sans le savoir – une part important de leur patrimoine placée à l’étranger. Les assurances, les banques et les fonds d’investissements ont largement investi dans la zone euro. Reconvertis en mark, ces placements allemands à l’étranger perdraient 158 milliards d’euros de valeur, soit 7% du PIB. Voilà qui ne devrait pas ravir les épargnants allemands.Mais que nous coûtera l’euro si nous le conservons ? Et si de plus grands pays que la Grèce ou l’Irlande venaient à nous appeler à l’aide ? L’Allemagne pourrait se retrouver à devoir garantir des sommes de plus en plus inimaginables. Pas besoin d’être un grand mathématicien pour comprendre qu’à terme le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Mais il y a un mais : que se passera-t-il à court terme si l’Allemagne quittait la zone euro ? Tous les scénarios sont unanimes : cela ne se passera pas en douceur.
Il est à peu près certain que la réintroduction du mark et la dévaluation de l’euro privé de l’Allemagne marquerait le début d’un vaste mouvement des fonds à l’étranger.
Les Grecs, les Espagnols et les Irlandais chercheraient immédiatement à déposer leur argent en Allemagne. Pour éviter cela, il faudrait recourir à des moyens radicaux : fermer les banques, limiter les transferts de capitaux, peut-être même fermer les frontières. Pour Barry Eichengree, la fin de l’euro sonnerait le début de "la pire crise financière de l’histoire".
Les union monétaires, une question toujours politique
Il n’est pas dit que la situation dérape à ce point. Toutefois, la peur d’un tel chaos social reste plus importante que la crainte de voir l’euro nous coûter toujours plus cher. Pour l’historien Michael Bordo, il y aurait toutefois une circonstance où l’Allemagne serait prête à accepter ce risque : "Si l’un des pays fondateurs de l’euro, l’Italie par exemple, se trouvait en situation d’urgence, cela pourrait inciter l’Allemagne à rompre les traités européens".A cela s’ajoute l’aspect politique de la question. Les – rares – travaux des économistes en matière d’union monétaire leur ont au moins appris une chose, explique Bordo : "Les unions monétaires sont constituées pour des raisons politiques, elles sont approfondies pour des raisons politiques et elles finissent toujours par s’écrouler pour des raisons politiques".
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