TOUT EST DIT

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mardi 2 novembre 2010

Obama II

Il n'est pas inhabituel de voir un président perdre sa majorité lors des élections de mi-mandat. Ronald Reagan, comme Bill Clinton, en ont fait l'expérience deux ans après avoir été élu. A chaque fois, les arbitres sont les indépendants. En 2008, leur préférence allait à Obama (8 %), en 2010, elle va aux républicains (20 %).

A quelques heures de la fermeture des bureaux de vote, la seule question qui se posera ce soir est quelle est l'ampleur de la victoire des républicains ? D'ores et déjà, on leur prête entre 30 et 70 sièges supplémentaires à la Chambre des représentants, là où il ne leur en faut que 39 pour avoir la majorité. Au Sénat, il n'y a pas de scénario assuré. Les démocrates peuvent espérer conserver la majorité (entre 51 et 53 sièges). Mais cela ne suffira pas pour faire avancer leur programme législatif. La menace de la procédure du « fillibuster » suffit à bloquer les votes pour qui n'a pas rallié 60 voix.

Qu'il conserve ou non la majorité au Sénat, qu'une cohabitation s'instaure ou pas avec les républicains au Congrès, la deuxième partie du mandat de Barack Obama va être profondément modifiée. Obama II va se caractériser par un rayon d'action plus limité pour le gouvernement mais marque aussi le lancement officiel de la campagne pour l'élection présidentielle de 2012.

Dès janvier, il n'y aura plus de réforme possible. Les chances de passer des projets de loi ambitieux, comme sur le climat ou l'immigration, sont pratiquement nulles. Le président devra recourir aux « ordres exécutifs » pour gouverner et utiliser, le cas échéant, son droit de veto si les textes passés au Congrès lui déplaisent. Celui-ci devient d'ailleurs son arme la plus efficace quand il s'agira de négocier avec le camp adverse. Mais les terrains d'entente sont limités. A la rigueur, des compromis pourront être trouvés sur le renouvellement des fonds pour l'éducation et la politique du « No child left behind », ou encore pour quelques traités commerciaux bilatéraux.

Le fait est que le 112 e Congrès élu aujourd'hui comptera beaucoup plus de républicains conservateurs que modérés, dont un petit groupe représentera les Tea Parties, qui ont l'ambition de réduire les impôts et l'influence du gouvernement. Les républicains ont déjà prévenu qu'ils étaient prêts à reconsidérer des pans entiers de la législation sur la santé ou de la réforme des services financiers. Mais surtout, ils sont décidés à ne pas perdre de vue leur objectif principal : empêcher la réélection de Barack Obama.

Or c'est précisément la tâche à laquelle le président va se dédier. Il a trop peu accompli, trop déçu une partie de sa base, pour ne pas vouloir une deuxième chance. Ses équipes sont en train d'être réorganisées à cet effet. Son conseiller politique, David Axelrod, va quitter la Maison-Blanche pour préparer la campagne de 2012 à Chicago. David Plouffe, co-inspirateur de la campagne de 2008, va lui succéder. A part peut-être Bill Clinton, personne ne connaît aussi bien que lui les enjeux de chaque circonscription. Robert Gibbs, l'actuel porte-parole de la Maison-Blanche, pourrait prendre la tête du Democratic National Committee et se charger de lever des fonds.

A eux de mettre en place une stratégie qui enflamme à nouveau le parti démocrate et séduise les indépendants. A eux d'aider le président à donner une image lisible de qui il est et de ce qu'il veut. La nouvelle présidence Obama devra gagner en clarté, en identité, en proximité. L'image de cet intellectuel épris de complexité et que rien ne bouleverse doit être modifiée. Durant la première partie de son mandat, Obama a agi en pompier. Il a pris des mesures extrêmes pour mettre fin à la récession. Il a accepté des compromis pour la réforme qui lui paraissait la plus urgente, celle de l'assurance-santé. Il a renvoyé des troupes en Afghanistan pour se donner une chance de sortir la tête haute avant juillet prochain.

Barack Obama doit maintenant donner une vision qui redonne de l'espoir à une Amérique qui craint son déclin et se voit à la merci de nations plus vigoureuses comme la Chine et l'Inde. Il doit se poser, à l'instar des derniers jours de la campagne, comme le défenseur des intérêts de la classe moyenne.

Il doit renouer le dialogue avec le monde des affaires dont l'hostilité est croissante et qui se refuse à embaucher - et alors même que la gauche lui reproche une réforme trop timide de Wall Street. Il doit, enfin, incarner des convictions plutôt qu'une promesse de changement.

A mi-mandat, la récession a eu raison des principaux soutiens du président et de son parti - les jeunes, les noirs, les femmes -dont la mobilisation dans les isoloirs reste incertaine aujourd'hui. La persistance d'un taux de chômage élevé, la faiblesse continue du marché immobilier, le manque d'horizon pour chacun sont les causes principales de l'anxiété des Américains. Mais leur malaise ne s'explique pas que par l'économie. La façon de gouverner du président a eu une incidence - trop isolé, trop consensuel, parfois trop populiste -comme ont joué les promesses non tenues à l'instar, par exemple, de la fermeture de Guantanamo… Le cahier des charges est connu, il reste encore vingt-quatre mois pour le satisfaire.

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