TOUT EST DIT

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mardi 8 février 2011

Un problème d'autorités


Peut-on, dans une démocratie, exercer le pouvoir sans autorité ? C'est toute la question que pose l'offensive menée par l'exécutif pour prendre le contrôle d'organismes « indépendants » - agences, conseils, commissions, autorités et, même, hautes autorités -auxquels l'Etat a confié depuis quarante ans des missions de contrôle, de surveillance, de régulation, voire de sanction. C'est bien dans ce contexte qu'il faut analyser l'interdiction désormais faite au président de la CNIL d'être issu des bancs du Parlement. Se sentant visé, Alex Türk défend son bilan dans « Les Echos », mais ce n'est pas l'homme qui est en cause. C'est sa fonction.


Au même moment, en effet, l'Etat regroupe, sous l'égide d'un Défenseur des droits, cinq autorités indépendantes, dont la Halde, la Médiation de la République et la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Bien que ce Défenseur soit élevé au rang d'institution de la République, le fait qu'il soit nommé par le chef de l'Etat suffit à lui faire perdre sa présomption d'indépendance. Quant à la nomination d'un commissaire du gouvernement à l'Arcep, qui a fait l'objet d'un autre amendement récent, elle est également perçue comme une reprise en main de cette instance de régulation des télécoms. Enfin, faute d'avoir su défendre son indépendance, l'Agence de sécurité sanitaire va devoir se plier aux exigences d'un pouvoir politique qu'elle était censée préserver de tout conflit d'intérêts.


La phase de repli qui s'amorce pour la quarantaine de nos autorités indépendantes est souvent perçue comme un recul des libertés publiques. Car, fortes des puissants outils qui leur ont été donnés, elles font d'efficaces contre-pouvoirs. La démocratie va-t-elle y perdre ? Rien n'est moins sûr. Car cette dépossession du politique par lui-même n'est pas exempte de reproches. Elle a conduit à l'émergence de justices parallèles, pas seulement dans le cas extrême de la Halde, dont les avis, fondés moins sur le droit de tous que sur le droit de chacun, ont fini par fragiliser la laïcité à la française. Ces autorités indépendantes ont pour autre défaut d'avoir, par nature, une vision parcellaire de l'action publique, quand l'Etat a, lui, une appréhension globale de l'intérêt général. Cette hémianopsie peut contrarier la volonté politique issue du suffrage universel. C'est le cas lorsque, au nom du respect de la vie privée auquel elle est chargée de veiller, la CNIL freine le développement de la vidéosurveillance, nécessaire à la sécurisation des lieux publics. L'indépendance ne fait pas forcément une bonne politique.

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