Au moins 173 personnes ont été tuées en Libye depuis le début de la contestation le 15 février selon Human Rights Watch (HRW), alors que Saif el-Islam Kadhadi, le fils du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, a affirmé que le pays était au bord de la guerre civile et était la cible d'un complot étranger, lors d'une allocution télévisée dans la nuit de dimanche à lundi.
La plupart des victimes ont été tuées à Benghazi, deuxième ville du pays à 1.000 km à l'est de Tripoli, mais selon des témoins joints par l'AFP, des heurts sanglants ont éclaté samedi à Musratha, à 200 km à l'est de la capitale.
Dans la capitale libyenne, des dizaines d'avocats ont participé à un sit-in de protestation contre la répression devant le tribunal, selon des témoins et des sites d'opposition.
De nombreux habitants constituaient des réserves alimentaires tandis que des commerçants vidaient leurs boutiques, de crainte de manifestations à venir.
Des membres des comités révolutionnaires en civil patrouillaient les rues de Tripoli, très peu animées, à bord de voitures parfois sans plaques d'immatriculation, selon d'autres témoins.
Des affrontements ont eu lieu par ailleurs dimanche à Zaouia, à 60 km à l'ouest de Tripoli, de mêmes sources.
Selon le directeur du bureau de HRW à Londres, Tom Porteous, "au moins 173" personnes ont été tuées depuis mardi. Ce décompte est basé sur des sources hospitalières dans quatre villes de l'est du pays, dont Benghazi, a-t-il ajouté, précisant qu'il s'agissait d'un chiffre incomplet en raison des difficultés de communications dans le pays.
Selon un décompte de l'AFP établi à partir de différentes sources libyennes, le bilan de la contestation contre le régime du colonel Kadhafi s'élevait à au moins 77 morts, pour la plupart à Benghazi.
Dans cette ville, des milliers de personnes ont manifesté devant un tribunal, a indiqué à l'AFP Mohammed Mughrabi, un avocat.
Les services de sécurité, cités par l'agence officielle Jana, ont indiqué que des affrontements se poursuivaient autour d'une caserne de Benghazi, faisant des morts et des blessés parmi les assaillants et les militaires. Selon des témoins, de nombreux manifestants avaient été tués samedi lors d'une tentative d'assaut contre cette caserne.
"Nous demandons à la Croix Rouge d'envoyer des hôpitaux de campagne. Nous ne pouvons plus faire face", a déclaré M. Mughrabi.
"Il semble que le leader libyen ait ordonné à ses forces de sécurité de mettre fin à tout prix aux manifestations, et que les Libyens soient en train de payer ce prix de leur vie", a dénoncé Amnesty International.
Le Premier ministre Al-Baghdadi Al-Mahmoudi a indiqué que la Libye était en "droit de prendre toutes les mesures" pour préserver l'unité du pays, lors d'une réunion avec les ambassadeurs des pays de l'Union européenne à Tripoli, selon l'agence Jana.
La Ligue arabe a appelé pour sa part dans un communiqué "à cesser immédiatement tous les actes de violence".
Le représentant permanent de la Libye auprès de la Ligue, Abdel Moneim al-Honi, a annoncé qu'il démissionnait pour rejoindre "la révolution" et protester contre la "violence contre les manifestants" dans son pays.
Plusieurs pays occidentaux se préparaient à évacuer leurs ressortissants, tandis que la Turquie a déjà rapatrié plus de 500 personnes depuis samedi, certaines disant avoir été la cible de violences à Benghazi.
Selon un responsable syndical tunisien, des centaines de Tunisiens ont quitté dimanche la Libye pour se réfugier dans leur pays et fuir "un vrai carnage".
Mouammar Kadhafi n'a fait aucune déclaration officielle depuis le début du mouvement.
La télévision publique libyenne a annoncé que Seif Al-Islam, un de ses fils, allait s'exprimer dimanche soir.
A Musratha, troisième ville du pays, les forces de l'ordre étaient appuyées samedi par des "mercenaires africains" qui "tir(aient) sur la foule sans distinction", selon des témoignages concordants.
Par ailleurs, un haut responsable libyen a indiqué dimanche qu'un "groupe d'extrémistes islamistes" retenait en otage des membres des forces de l'ordre et des citoyens à Al-Baïda, dans l'est du pays, exigeant la levée du siège autour de lui.
Parallèlement, les autorités ont annoncé avoir arrêté des dizaines de ressortissants arabes appartenant à un "réseau" ayant pour mission de déstabiliser le pays, selon Jana.
Selon la présidence hongroise de l'UE, les autorités libyennes ont convoqué un représentant de l'UE à Tripoli pour menacer de cesser sa coopération dans la lutte contre l'immigration si l'Europe continue à "encourager" les manifestations sans précédent dans le pays.
En dépit de ces menaces, les Européens ont condamné avec fermeté la répression sanglante des manifestations.
"Nous appelons à la retenue, nous exhortons à mettre fin aux violences et à dialoguer", a déclaré la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton.
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