mardi 18 janvier 2011
L'Europe et les terres rares
Pour notre Europe, voici un nouveau sujet de préoccupation : son approvisionnement en « terres rares », ces éléments métalliques, appelés « lanthanides » et utilisés dans les TIC, les technologies de l'information et de la communication (écrans plats, portables, CD, DVD), les technologies vertes (pots catalytiques, éoliennes), certaines applications militaires (missiles, télémètres)... On en compte dix-sept. Les plus rares sont le thulium et le lutécium.
Leur rareté vient de leur dispersion, de leur découverte progressive et, actuellement, du quasi-monopole (95 %) chinois sur leur production. Celui-ci est dû à la richesse du sous-sol en terres rares, surtout en Mongolie. Mais il l'est aussi aux conditions économiques, financières, sociales et environnementales de leur exploitation, toutes conditions qu'aucun État occidental ne peut accepter. En outre, la Chine a réduit ses exportations de 48 % pour 2010 et les réduirait de 30 % pour 2011. Il y a d'autant plus urgence à chercher d'autres sources que la demande va exploser. Il faut donc explorer, trouver, investir et produire ailleurs, mais où ? Ou autrement, mais comment ?
Les experts nous livrent deux réponses qui peuvent surprendre. L'une : trouver dans les décharges (500 000 dans l'Union européenne) par un recyclage des déchets ; l'autre : trouver dans des plantes, dont les algues, capables d' « hyperaccumulation » de métaux. Il est impératif d'y recourir, d'autant plus que les processus de traitement des terres rares, en l'état actuel des techniques, comportent des dangers tant pour les personnes que pour l'environnement, en raison de l'emploi de produits chimiques toxiques et d'acides.
Néanmoins, dans l'immédiat, il faut produire à partir du sous-sol. La reprise de l'exploitation, aux États-Unis (la mine de Mountain Pass, en Californie) et en Afrique du Sud est sérieusement envisagée. En Australie, la compagnie Lynas a racheté à Rio Tinto, à Mount Weld, l'un des plus riches gisements du monde. Au Brésil (650 tonnes produites), au Canada, au Groënland, en Inde (3 000 tonnes) produites, en Russie et au Kazakhstan, il existe des réserves prouvées qu'il va falloir exploiter.
Le sous-sol européen n'est pas dépourvu de terres rares. La Commission européenne a engagé une « Initiative matières premières » qui en concerne quatorze, dont les terres rares. Trois orientations ont été retenues : la sécurisation des approvisionnements, l'inventaire des ressources internes par une exploration en grande profondeur, le recyclage. La Commission doit présenter ses propositions le 26 janvier.
En France, le gouvernement a adopté, en avril 2010, un plan d'action dont le Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) est le principal maître d'oeuvre. Il vise à assurer à nos industries un accès à ces métaux rares, à développer l'exploration (la prochaine à Wallis et Futuna) et le recyclage des déchets.
Sans doute l'importance du défi lancé à nos économies justifierait-elle que, au niveau du G20, l'on réussisse à installer une « gouvernance mondiale » sur les matières premières minérales. Toutefois, il faut surtout s'attendre à une rude compétition entre États, compagnies minières, fonds d'investissement, dont les fonds souverains. C'est pourquoi les institutions et gouvernements de l'Union européenne doivent unir, dans un effort commun, savants, ingénieurs, industriels, financiers, pour que notre Europe ne soit pas complètement marginalisée et dépendante.
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