TOUT EST DIT

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mardi 18 janvier 2011

La révolution de Jasmin ne s'exportera pas

L'onde de choc de la Révolution tunisienne ne risque pas de déstabiliser les autres régimes arabes. En tout cas pas immédiatement, selon Antoine Sfeir. Journaliste et directeur des Cahiers de l'Orient, celui-ci revient sur les bouleversements qui secouent le Maghreb depuis la « Révolution de Jasmin ».

France-Soir. La Tunisie prend-elle le virage démocratique réclamé lors de la révolution ?
A. Sfeir. Premièrement, le retrait du syndicat UGTT du gouvernement (mardi, trois ministres ont quitté l'exécutif en raison du maintien du RDC de Ben Ali au sein des ministères régaliens, NDLR) pose des problèmes révélateurs. Le fait qu'un pouvoir en partie issu du clan du président détrôné soit chargé des élections dans six mois jette la suspicion au sein de la population. Pour le reste, il ne faut pas jouer gratuitement au prophète. Les événements se succèdent à une vitesse étonnante et les inconnues sont nombreuses : la capacité d'action des fidèles de Ben Ali notamment et le rôle de l'armée dans les mois à venir.

Existe t-il une menace islamiste potentielle en Tunisie ?
Pour le moment, non. Le parti islamiste Ennahda n'est pas encore rentré au pays (Interdit sous Ben Ali, il a fait savoir lundi qu'il veut être légalisé, NDLR). Les thèses islamistes avaient beaucoup plus d'échos auprès de la population tunisienne à la fin des années 1980. Paradoxalement, la montée de l'islamisme radical ailleurs dans le monde a contribué à marginaliser encore plus l'islam politique en Tunisie parce que les classes moyennes en avaient peur.

Et concernant l'armée, y a t-il un risque de confiscation du pouvoir ?
L'armée tunisienne a une tradition républicaine forte. Mais ayant pris fait et cause pour le peuple contre Ben Ali, on aurait du mal à la voir uniquement comme une « grande muette ». Seul l'avenir nous dira ce qu'il en est.

Les autres régimes arabes peuvent-ils connaître une même révolution « à la tunisienne » ?
Cela me semble peu probable. Les conditions ne sont pas les mêmes. En Egypte, l'armée est garante de l'ordre public et totalement solidaire de Moubarak, dont ce dernier est issu. Elle ne basculera pas comme en Tunisie, parce que c'est elle qui est au pouvoir. En Algérie aussi l'armée règne main dans la main avec Bouteflika. Et dans ce pays, la classe moyenne n'existe pas. Il y a une classe indécemment riche et une paupérisation du reste de la société. En Syrie, le régime est tenu par une minorité mais il y a une certaine redistribution des richesses. Moindre qu'en Tunisie, mais redistribution tout de même. Là encore, les militaires contrôlent tout.

La relative « réussite économique » en Tunisie a t-elle contribué à la révolte ?
Tout à fait. Ce sont les classes moyennes qui font les révolutions. Le problème vient de ce que Ben Ali a totalement ignoré les critiques contre la corruption du pouvoir. Et que le développement de l'enseignement universitaire était en inadéquation avec le marché du travail tunisien.

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