TOUT EST DIT

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mardi 11 janvier 2011

La trahison du désert

Est-ce un rêve brûlé par la fournaise de l’actualité ? Un mirage évanescent définitivement évanoui sur la carte des stratégies guerrières ? Une poignée de sable livrée au vent mauvais du terrorisme ? Le désert était un lieu d’absolu. Un infini qui rapprochait du ciel. Un espace de dépouillement intégral qui permettait d’abandonner au bord de la piste les oripeaux du réel et les calculs du temps. Mais ce matin tous les hommes et toutes les femmes épris de liberté sont orphelins de ce Sahara où se réfugiait l’évasion.

Image de pureté, vraie ou fantasmée, le désert des déserts est souillé par le sang. Qui aurait pensé qu’il pourrait un jour servir de prison, hein, Petit Prince ? Il paraît qu’avant l’aube pressée de l’Afrique, ton Saint-Ex a pleuré, les grandes ailes de son avion fracassées pour la seconde fois sur le sol dur et froid d’un monde qui anéantit un à un ses sanctuaires.

Il n’y a pas si longtemps - oh, vingt-cinq ans à peine - le voyage en 4x4 d’Alger jusqu’à Ouagadougou ou Bamako, en passant par Tamanrasset, la frontière solitaire d’Arlit et Niamey, était une initiation sur les itinéraires éternels des caravaniers. Une traversée vers l’inconnu qui recule et se dérobe derrière les lignes tremblantes des ergs ou des pierrailles lunaires. En descendant vers le tropique et au-delà, à destination de soi-même sans le savoir, on grandissait… Le risque, c’était l’égarement. La solitude dans un environnement sublime et par nature hostile. La tempête qui brouillait tout. On avait peur de se perdre mais on ne redoutait personne.

Le péril d’aujourd’hui, c’est le salut d’hier : la rencontre. La mauvaise rencontre. A qui faire confiance ?

La politique française en Afrique subsaharienne semble perdue elle aussi. Ses repères traditionnels, hérités de son empire colonial et jalousement protégés depuis, s’affaissent les uns après les autres quand ils ne disparaissent pas purement et simplement, avalés par un nouvel ordre international et des rivalités ethniques qui dévorent les anciens équilibres.

La France ne sait plus trop quelle direction prendre sur ces territoires sahéliens où elle n’a pas intérêt à être trop voyante et encore moins à s’engager, mais où elle veut et doit, malgré tout, rester présente et influente.

Ce fil fragile et délicat, c’est bien celui sur lequel l’exécutif a décidé d’avancer dans la nuit de vendredi à samedi en tentant de libérer par la force les deux otages du Niger. Il n’y a pas eu de changement de doctrine diplomatique, comme on a pu le dire et l’écrire un peu trop précipitamment. Simplement une rude variation de tension, et elle a secoué l’échelle des dangers.

En exprimant une franche détermination, l’intensité de la colère de Paris a produit des effets sans qu’on sache encore s’ils seront ou non productifs.

Seule certitude : le désert, désormais, est un adversaire. Et c’est triste…


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