Le ministre du Budget, François Baroin, s'est rendu hier à Berlin pour rencontrer le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, et dégager des axes de convergence fiscale entre les deux pays.
Réduire les écarts de compétitivité en Europe, en commençant d'abord par la France et l'Allemagne : c'est le voeu exprimé par Nicolas Sarkozy le mois dernier, et qui s'est traduit hier par un premier déplacement du ministre du Budget, François Baroin, à Berlin. Celui-ci a multiplié les rencontres, à gauche comme à droite, prouvant ainsi qu'après avoir émis des réserves sur la stratégie allemande jugée trop « égoïste », la France semble plus que jamais décidée à coller à son puissant partenaire. Un pays qui, en matière budgétaire, fait toujours office de modèle : « Quelle que soit leur sensibilité politique, tous les Allemands sont d'accord, ou presque, pour affecter les surplus de recettes [dus à la révision de la croissance à 3 % cette année, NDLR] au désendettement. En France, non », a résumé François Baroin à l'issue de son entretien avec la députée de gauche Petra Merkel (SPD), présidente de la commission budgétaire. « L'Allemagne est un modèle dont nous devons nous inspirer, a-t-il insisté à l'issue de ses entretiens, devant la presse. Le consensus politique sur la réduction des déficits dans la société allemande est assez spectaculaire. »
A plus long terme, le gouvernement espère bien obtenir le soutien de l'Allemagne sur plusieurs sujets fiscaux de première importance. Le calendrier n'a rien d'anodin : la Cour des comptes vient d'entamer un état des lieux sur les systèmes fiscaux des deux pays. Le niveau de prélèvements est certes proche, 42,8 % pour la France et 39,5 % pour l'Allemagne. « Mais ces chiffres globaux recouvrent des réalités différentes », indique Nicolas Sarkozy dans sa lettre de mission (lire ci-dessous). L'Allemagne, par exemple, ne dispose ni de l'impôt de solidarité sur la fortune… ni du bouclier fiscal ! Cela est évidemment regardé de près par l'Elysée.
Arracher un accord européen
France et Allemagne promettent aussi d'oeuvrer de concert pour avancer à Bruxelles une proposition de taxation des activités numériques (Google, eBay, etc.), imposées dans le pays où se situe leur siège social (Irlande, Luxembourg, etc.), et non là où sont générées les richesses. La France avait envisagé d'agir seule en début d'année, en vain. Elle espère que son rapprochement avec l'Allemagne lui permettra d'arracher un accord européen, et de récupérer les milliards d'euros de recettes qui lui échappent chaque année. « C'est un enjeu primordial pour la France et l'Allemagne », insiste François Baroin. A plus long terme, le gouvernement veut également réfléchir à une convergence des taux de TVA : les taux réduits (appliqués à l'hôtellerie et à l'alimentation) sont plus élevés en Allemagne qu'en France, mais le taux normal y est plus bas (19 % au lieu de 19,6 %).
François Baroin s'est également rendu en Allemagne pour chercher un soutien face au Parlement européen, qui souhaite augmenter le budget de l'Union jusqu'à 4,9 %, à contre-courant des efforts budgétaires entrepris dans chacun des pays. Un état de fait inacceptable du point de vue de la France, qui refuse de voir sa contribution augmenter (de 1,5 milliard à compter de 2013). Il se rendra à Londres à la mi-septembre dans le même objectif.
Lucie Robequain
Cohérence. Par une lettre de mission en date du 2 août, Nicolas Sarkozy charge Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, d'un état des lieux des systèmes fiscaux français et allemand, « afin que nos gouvernements soient en mesure de prendre des décisions pour aller vers davantage de convergence fiscale tant dans le domaine de la fiscalité des entreprises que dans celui de la fiscalité des particuliers ». Un groupe de travail doit être constitué ces prochains jours, composé de membres de la Cour des comptes et de personnalités extérieures (économistes, fiscalistes). Il travaillera en parallèle de la Bundesfinanzakademie. Un rapport d'étape sera transmis dès fin septembre. Le rapport final est attendu pour la fin de l'année. L'Elysée a déjà fixé les priorités : côté entreprises, il demande à la Cour d'analyser les différences d'assiette entre les deux systèmes d'impôt sur les sociétés et leur impact sur la compétitivité. « Dans le domaine de la fiscalité des particuliers, une attention particulière sera portée à la cohérence globale de nos systèmes de prélèvements sur le revenu et le patrimoine », indique la lettre de mission.
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