TOUT EST DIT

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lundi 31 mai 2010

Dogmatisme bruxellois

Guillaume Pepy n'avait pas besoin de cela. Sans même parler de la gestion du quotidien, toujours pleine d'imprévus à la SNCF, les dossiers brûlants ne manquent pas sur l'agenda du président. Restructuration du fret, rentabilité déclinante du TGV, ouverture des grandes lignes internationales à la concurrence ou encore interrogations sur l'avenir du pôle transport régional de passagers, la liste est déjà longue. Pas assez cependant aux yeux de Bruxelles, semble-t-il. Au nom de l'équité entre entreprises du secteur, la Commission vient en effet de s'attaquer au statut de la SNCF qu'elle juge constitutif d'une aide d'Etat.

Résultat, Guillaume Pepy qui menait déjà de front les chantiers de la rénovation sociale et stratégique de l'entreprise va devoir se pencher aussi sur celui de la réforme du statut. Car, si l'initiative de la Commission a été reçue par un accueil glacial à Paris, l'ambition est claire. Il s'agit de mettre la SNCF au même régime que La Poste, c'est-à-dire d'obtenir à terme sa transformation en société anonyme. Seul moyen, estime Bruxelles, d'empêcher la compagnie ferroviaire de bénéficier de la garantie illimitée implicite de l'Etat français que lui confère son statut d'Epic (établissement public à caractère industriel et commercial). Et donc de restaurer de saines conditions de concurrence dans le transport ferroviaire européen. CQFD.

Le problème de ce raisonnement, c'est que si l'on voit bien ce qu'y gagnerait le dogmatisme bruxellois, on a plus de mal à en mesurer l'intérêt économique. Pas sûr en effet que la mutation demandée changerait grand-chose aux conditions de financement de la SNCF. Car, contrairement à ce que semble croire la Commission, une transformation en SA ne conduirait pas automatiquement à la dégradation des notes de crédit du groupe. Si la cote de La Poste a récemment baissé auprès des agences de notation c'est moins pour tenir compte de son changement de statut que de la brutale chute des volumes du courrier et de ses conséquences sur le « business model » de l'entreprise.

Dans ces conditions, on se demande bien pourquoi il faudrait ouvrir pareil chantier. Car ce qui est sûr en revanche, c'est qu'il déclencherait immédiatement une crise sociale de forte magnitude au sein de la SNCF. Le groupe ferroviaire n'est pas La Poste. Il n'y a pas si longtemps, la simple évocation de la création de filiales de droit privé dans le fret y a suscité une levée de boucliers. On n'ose imaginer la réaction des cheminots face à la perspective de l'abandon du statut d'Epic. Les syndicats auraient alors beau jeu de mobiliser contre une mesure qui, forcément, dans leur discours, mènerait à la privatisation du groupe à terme. De quoi bloquer pour de bon les réformes déjà engagées et bouleverser pour longtemps l'agenda de Guillaume Pepy.

FRANÇOIS VIDAL

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