TOUT EST DIT

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jeudi 27 mai 2010

Combat de dogmes

C'est l'heure de vérité et la vérité n'est pas à l'heure. Qu'il est difficile, dans ce pays, de préparer l'avenir dans la transparence et la sincérité ! Dans ce brûlant dossier des retraites, personne n'ose vraiment parler vrai de peur de provoquer l'explosion. Tout n'est que faux-semblant, stratégies de communication et calculs politiques. Un débat ligoté dans une camisole de dogmes.
C'est en empruntant beaucoup de détours, y compris par le site internet de Paris-Match, que le gouvernement a finalement confirmé ce qu'il avait programmé dès le début : le recul de l'âge légal de la retraite. Pourquoi tant de contorsions ? Le ministre du Travail a parfaitement le droit de défendre son option. Il n'a jamais fait mystère de cette conviction et il a de solides arguments pour la faire valoir. Jusque là, il avait fait preuve d'une certaine franchise dans son approche du dossier tout en évitant les paroles définitives. Mais pourquoi avoir si longtemps ménagé l'opinion à coup de dénégations pour la mettre du jour au lendemain devant le fait accompli ?
Peut-être une ultime culpabilité... avant de lever le tabou. Le président de la République, en effet, avait affirmé pendant la campagne présidentielle qu'il n'était « pas mandaté » pour liquider la retraite à 60 ans. Personne ne l'obligeait alors à prendre cet engagement majeur... qui a pesé lourd dans le vote ouvrier en sa faveur. Pour s'affranchir de cette promesse, la droite - au pouvoir depuis huit ans - tire maintenant sur l'héritage de Mitterrand. Au risque d'égarer le débat dans la polémique. A quand une diatribe contre Léon Blum et l'héritage de l'été 36 ?
Une réforme aussi importante que celle des retraites nécessite un minimum d'adhésion populaire. Mais l'Élysée semble avoir renoncé à rechercher le consensus pour passer en force. Le chef de l'État sait parfaitement qu'il heurte encore une majorité de Français mais il a décidé de prendre le risque d'avancer. Et il invoquera l'intérêt supérieur du pays pour se justifier.
Depuis hier, les négociations avec les syndicats n'apparaissent plus que comme un simple habillage républicain de décisions arrêtées depuis longtemps. Aujourd'hui, la réponse de la rue engagera un bras de fer que le pouvoir a anticipé. Le calcul est simple : tendre le dos, et tenir. Après, il y a la coupe du Monde et les vacances...
Il y avait pourtant de la place pour un vrai dialogue national. Peu à peu, les Français, plus ou moins résignés, se familiarisaient avec la nécessité incontournable de cotiser plus longtemps. Dans cette perspective, la retraite à 60 ans devenait un concept assez virtuel. Mais supprimer brutalement ce repère, c'est pénaliser clairement tous ceux qui ont commencé à travailler tôt et dur. C'est faire, d'emblée un bras d'honneur au principe, essentiel, d'une réforme juste.

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