samedi 16 mars 2013
L’amnistie dévoyée
En tentant d’acheter la paix sociale au prix d’une injustice, le gouvernement prend le risque d’encourager la violence.
Favoriser la paix civile est l’une des plus nobles missions de l’État : c’est même pour cela que l’amnistie a été inventée. Henri IV en a fait, avec l’édit de Nantes, une composante du génie français ; la République lui est restée fidèle en amnistiant, par exemple, « toutes infractions commises en relation avec les événements d’Algérie » (loi de 1968) et en rétablissant dans leurs droits les personnes impliquées dans ces mêmes événements, mais aussi ceux « de la guerre d’Indochine ou de la Seconde Guerre mondiale » (loi de 1982).
Ceux qui bénéficièrent de ces actes d’apaisement n’étaient donc pas une catégorie de personnes, mais tous ceux ayant subi les conséquences de leurs engagements, quel qu’ait été leur camp : partisans de l’Algérie française ou porteurs de valises du FLN, fonctionnaires de Vichy ou résistants de la “vingt-cinquième heure” impliqués dans les drames de l’Occupation ou de l’épuration. L’amnistie, certes, n’est pas l’oubli, mais, une fois la justice passée, elle exige une parfaite égalité de traitement entre les parties, faute de quoi toute réconciliation est impossible.
Blanchir les uns (incendiaires, casseurs, syndicalistes voyous) en flétrissant les autres (les patrons qui, comme chacun sait, licencient par plaisir !), c’est dévoyer l’idée même d’amnistie, laquelle n’aurait eu de sens que dans le cadre d’un texte voté en début de quinquennat et appliqué à tous les acteurs des conflits du travail.
En voulant acheter la paix sociale au prix d’une injustice, les promoteurs de la proposition de loi d’“amnistie sociale” adoptée le 27 février dernier par le Sénat et dont Valeurs actuelles dénonce les conséquences ne peuvent aboutir qu’à l’inverse de l’effet recherché : banaliser la violence et même l’encourager. Beau message envoyé à tous ceux qui seraient tentés d’investir en France !
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