lundi 14 mars 2011
Leçons japonaises
Tant que la situation ne sera pas stabilisée dans la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi, les Japonais et le monde vivront dans la hantise d'une catastrophe atomique de beaucoup plus grande ampleur. Faut-il quitter Tokyo ? Fuir vers le Kansai ? Se réfugier à l'étranger de crainte d'être rattrapé par un possible nuage radioactif ? Qui ne se poserait ces questions ? Dans tout autre pays que le Japon, des scènes de panique et de pillage se seraient sans doute déjà produites. Rien de tel jusqu'à présent dans la capitale nippone, où 40 millions de personnes vivent à un peu plus de 200 kilomètres de la centrale en perdition. Le calme remarquable du peuple japonais et son immense sens civique forceront toujours l'admiration du monde. Au Japon, ce ne sont ni l'Etat ni une administration décrédibilisée qui font la force de la volonté collective.
La « culture de sûreté », autrement dit la transparence, n'est d'ailleurs pas le point fort des autorités locales, alors qu'il s'agit là d'un élément essentiel pour bâtir la confiance du public. Lors de précédents accidents nucléaires graves, comme à Tokai-mura (2 morts) ou dans le surgénérateur de Monju, Tokyo a plutôt eu tendance à distiller l'information, parfois à cacher la vérité, voire, c'est arrivé, à falsifier des documents mettant en cause la hiérarchie administrative ou les ministres en place. Les réactions dignes et mesurées du public japonais aujourd'hui n'en sont donc que plus méritoires.
Cette leçon japonaise de retenue et de sang-froid doit être méditée, notamment par tous ceux qui se chargent, depuis deux jours, d'évaluer les conséquences de cet accident sur la filière nucléaire de manière définitive et dans un seul sens : son arrêt. Les images saisissantes et en direct de l'explosion survenue sur le site de Fukushima-Daiichi -et non pas « dans le réacteur », comme on l'a entendu trop souvent -ont certes fait le tour de la planète et portent un coup dur à l'industrie de l'atome. Après les accidents de Three Mile Island puis de Tchernobyl, l'« hiver du nucléaire », on le sait, a duré plus d'un quart de siècle.
Ce nouvel accident condamne-t-il pour autant la filière ? Ce serait ignorer que depuis la construction des réacteurs de Fukushima-Daiichi, il y a quarante ans, la filière a réalisé des progrès considérables en matière de sécurité mais aussi de transparence. Ignorer aussi qu'il existe désormais des réacteurs de 3 e génération conçus pour résister à un enchaînement d'événements encore plus inouï. Ce n'est pas parce que, dans des circonstances comme celles-ci, les discours raisonnés des industriels de l'atome sont peu audibles qu'il faut les ignorer.
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