« Avant de légaliser l'euthanasie, j'aimerais que l'on commence par améliorer l'accueil des personnes en fin de vie, en atténuant leur souffrance, mais aussi en continuant à les considérer comme des personnes à part entière. Les soignants le disent, si ces conditions sont satisfaites, la demande de mort disparaît le plus souvent », témoigne le cinéaste Frédéric Chaudier. Lorsqu'il apprend la grave maladie dont souffre son père, tous deux pensent alors que l'euthanasie est la seule solution : « Nous étions à mille lieues d'imaginer que l'existence puisse encore lui (nous) offrir des périodes utiles. Pourtant, c'est bien ce que nous avons expérimenté, » explique-t-il à La Vie (1).
Le Sénat se penchera, demain, sur une proposition de loi sur l'euthanasie. Or, un récent sondage Opinion Way montre que la grande majorité des Français préférerait que leurs proches en fin de vie aient des soins palliatifs (63 %), plutôt que de subir une euthanasie (36 %) (1).
D'après la proposition de loi, on pourrait faire connaître à l'avance son désir sur sa manière de mourir en cas de maladie. Une chose est de prendre cette décision en pleine forme, une autre de la vivre quand l'heure approche ! On nous donnerait seulement huit à quinze jours entre la demande et l'exécution de l'acte !
Le flou est immense : comment s'assurer que la personne est vraiment libre ? Quid des demandes qui traduisent plus une détresse qu'un véritable choix ? La précipitation est aussi impressionnante. Cette proposition de loi court-circuite les travaux de l'Observatoire de la fin de la vie, créé juste l'année dernière. De plus, elle ne tient pas compte du fait que la loi Léonetti sur la fin de vie, votée voici cinq ans, est méconnue : 68 % des Français ignorent qu'elle interdit l'acharnement thérapeutique, principale cause des demandes d'euthanasie ! On voit clairement la contradiction : une nouvelle proposition vient, alors que la loi précédente n'est pas appliquée comme il convient.
La prudence s'impose, comme le réclame le Manifeste citoyen pour la dignité des personnes en fin de vie, rassemblant de grandes personnalités : « [...] Un droit à une injection létale et/ou à un suicide assisté »... ferait... « courir des risques aux plus vulnérables et aux plus démunis d'entre nous. [...] Alors que notre pays s'apprête à débattre du financement de la dépendance [...], notre vigilance [...] commande de ne pas se donner les moyens législatifs qui pourraient être détournés à des fins de pression sur des personnes dépendantes, auxquelles on présenterait la mort choisie comme une solution citoyenne généreuse. De plus, confier aux professionnels de santé la fonction spécifique de pratiquer des injections mortelles sur les lieux mêmes où ils soignent, s'avère contraire à leur mission [...] Aucun motif ne saurait autoriser quiconque à décider qu'une vie ne vaut pas la peine d'être vécue. »
Face à ce grave danger, il convient de veiller à l'application de la loi Léonetti : développer les soins palliatifs, informer les Français sur leurs droits, former les personnels soignants à combattre la souffrance plutôt qu'à l'euthanasie, et s'assurer de la poursuite des recherches pour les cas les plus difficiles.
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