TOUT EST DIT

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vendredi 12 août 2011

Les muscles de Mr. Cameron

Les catastrophes servent souvent les destins des hommes politiques parce qu’ils sont des révélateurs de caractère. Ce sera peut-être le cas de David Cameron, prototype parfait, jusque-là, d’un Premier ministre sans grande envergure. Il n’a ni l’incroyable culot d’une Margaret Thatcher, ni le brio de Tony Blair. Et s’il a gagné les élections après une longue période de disette pour les conservateurs, c’est d’abord en raison de l’usure des travaillistes et du manque absolu de charisme d’un Gordon Brown à bout de souffle. M. Cameron n’a pas eu de chance non plus avec le timing de l’histoire : quand il a enfin pu entrer à Downing Street, c’était à un moment où le Royaume-Uni était en déclin après avoir connu une période économique faste.

Et c’est ce chef du gouvernement en demi-teinte qui a dû affronter les pires émeutes de l’histoire de la Grande-Bretagne depuis des décennies. C’est lui aussi qui a considéré l’heure suffisamment grave pour convoquer les députés de la Chambre des Communes à Westminster en pleines vacances, un symbole qui est loin d’être anodin dans une démocratie aussi soigneusement codifiée et où les usages ne se bousculent pas à la légère.

Le discours d’hier à Westminster a donc été pour lui une sorte de rite de passage qu’il a accompli en se glissant sans surprise dans les habits rigides et résistants d’un dirigeant aussi responsable qu’inflexible. Il sait qu’il a le soutien d’une immense majorité de la population et de la presse anglaises. Qui pourrait trouver des excuses au déchaînement de jeunes dont la seule motivation a semblé se résumer au vol, au pillage et au vandalisme ? Le Labour de M. Milliband n’a pratiquement aucun angle d’attaque politique. Même le discours sur les conséquences de la gestion ultralibérale du pouvoir depuis plusieurs mois n’a pratiquement aucune chance d’être audible.

M. Cameron qui avait surtout à convaincre son propre camp de sa capacité d’homme d’État, et à contrer des personnalités alliées mais critiques comme le maire de Londres Boris Johnson qui avait mis en cause son manque de réactivité initial, a pu annoncer une « riposte » musclée sans craindre de heurter les préventions démocratiques du pays de l’habeas corpus.

En revanche, la chasse ouverte aux réseaux sociaux est étrange de candeur et révélatrice de l’ignorance sidérante de nombreuses personnalités politiques à l’égard d’un mode de communication qu’ils ne comprennent pas. Comment peut-on prétendre séparer le grain de l’ivraie sur Twitter ou réglementer l’usage du réseau fermé de Blackberry (BMB) ? Les Britanniques seraient-ils prêts à abdiquer devant la peur en renonçant à leur traditionnel attachement aux libertés publiques pour des gages de sécurité ? Rien n’est moins sûr mais cette grande question de l’après-émeutes est désormais posée à toute une société traumatisée.

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