TOUT EST DIT

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mercredi 20 octobre 2010

Supplice

Pour la sixième fois depuis le début de l'année, les lecteurs des « Echos », comme tous ceux de la presse quotidienne nationale, ont été privés hier de leur journal. Ces non-parutions à répétition, provoquées par un syndicat minoritaire dans le secteur, donnent la même impression d'absurdité qu'une série de supplices appliqués à un malade. A la longue, elles ne peuvent aboutir qu'au même résultat : la mort pour la majorité des grands quotidiens nationaux. Tout le monde sait que la presse écrite traverse une crise sans précédent dans l'ensemble des pays industrialisés, où son histoire et son rayonnement furent étroitement liés au développement de la démocratie. La perte d'importantes recettes publicitaires, attirées par de nouvelles formes de médias, la concurrence d'autres canaux de diffusion de l'information et, pour ce qui concerne particulièrement la France, une modernisation trop tardive de son mode de diffusion et de production, ont considérablement fragilisé la presse quotidienne nationale. Or c'est uniquement cette dernière, à l'occasion de grèves soudaines, erratiques et souvent disproportionnées qui se voit la plus pénalisée. Les quotidiens régionaux, c'est heureux pour eux, ne subissent pas le même traitement. Les périodiques ont au moins la possibilité de compenser leur perte de diffusion sur la semaine ou le mois. Les télévisions peuvent continuer de faire leur travail normalement, de même qu'une grande partie des radios. Notre seul recours est de trouver refuge sur la planète Internet, où désormais des éditions numériques sont offertes en accès gratuit aux lecteurs privés de leur quotidien, ce qui ne répare pas les dégâts financiers causés à toute la filière par une journée de non-parution. Car ce qui commence par des quotidiens absents des kiosques finit par des kiosques absents des rues. Longtemps considérés comme « l'aristocratie » du monde ouvrier, les travailleurs du Livre bénéficient encore d'un statut privilégié. Des salaires et des conditions de travail très avantageux dont la principale justification était qu'en garantissant la parution des quotidiens, quelles que soient les circonstances, ils remplissaient un rôle essentiel dans le débat démocratique. En rompant ce contrat implicite, la minorité des fauteurs de grève engage une « lutte finale » qui pourrait bien ne pas être celle qu'elle croit.

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