Contrairement à ce qu'il veut laisser croire, le chef de l'Etat ne fait pas preuve d'un volontarisme hors pair en s'attaquant au régime des retraites. Nos voisins européens ont pour la plupart traité le problème, et c'est la crise économique et financière, avec son lot alarmant de dette et de déficits, qui l'a contraint à agir.
Ce chantier n'était pas au programme du candidat Sarkozy. Il s'est imposé lorsque les dérèglements du capitalisme ont précipité les risques d'explosion du système actuel. Le conseiller social du président, Raymond Soubie, estime que les échéances ont été avancées de vingt ans. C'est donc maintenant qu'il faut régler l'horloge des retraites, maintenant qu'il faut être courageux. Et équitable.
Mais une réforme d'envergure ne peut être acceptée qu'à deux conditions au moins : être expliquée avec méthode; être portée par des idées justes. Or ces exigences font défaut.
L'explication? Le gouvernement l'a bâclée depuis le début, choisissant la course de vitesse – une mauvaise appréciation du temps – afin d'imposer ses vues. Pour changer au fond, il fallait expliquer sans précipitation. C'est tout le contraire qui s'est passé, sur un dossier dont l'enjeu n'a d'égal que la complexité. Une réforme n'est légitime que si elle est comprise. Ce n'est pas le cas. Qu'elle soit portée par un président aussi impopulaire n'arrange rien.
C'est justement ce déficit d'explication qui ouvre la porte aux idées fausses dont l'opposition socialiste est devenue le chantre, fourvoyant une partie de la jeunesse, à juste titre inquiète pour son avenir, dans une impasse empreinte de démagogie. Laisser croire par exemple que le marché du travail est un gâteau à partager, que plus les "seniors" resteront, moins les jeunes entreront, est une contre-vérité.
C'est au contraire dans les pays où les plus âgés sont les plus actifs que l'emploi des plus jeunes est le plus dynamique, le travail des premiers favorisant le travail des seconds, et non l'inverse.
Malgré ses efforts, Mme Aubry ne parvient pas à dissiper l'impression première, qui, faute d'être forcément la bonne, demeure la plus forte: une confusion sur les véritables orientations du PS en matière de retraites, aggravée par l'engagement "totémique" d'un retour aux 60 ans pour l'âge légal du départ à la retraite.
En se polarisant sur ce que M. Strauss-Kahn ne reconnaît pas comme un dogme, le PS se trompe de combat et risque de s'enfermer dans une attitude résolument passéiste. Il manque aussi l'occasion de construire sa crédibilité sur la seule vraie cause qui vaille: insuffler dans la réforme nécessaire un non moins nécessaire esprit de justice. S'il n'est pas trop tard.
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