Le constat est frappant : les femmes obèses de moins de trente ans déclarent quatre fois plus de grossesses non désirées ou d'avortements que celles du même âge de poids normal. Elles prennent moins la pilule et consultent également moins le médecin pour leur contraception. Enfin, elles sont trois fois plus nombreuses à rencontrer leurs partenaires sur Internet.
Toutes ces données émanent d'une étude dirigée par Nathalie Bajos, directrice de recherche à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et publiée mardi 15 juin sur le site Internet du British Medical Journal.
Réalisée à partir des données de l'enquête sur les comportements sexuels des Français, menée en 2006 auprès de plus de 12 000 personnes, elle démontre pour la première fois le lien entre indice de masse corporelle (IMC, le poids divisé par la taille au carré), et activité sexuelle, mais aussi entre IMC et santé sexuelle (satisfaction, avortement…).
IMPACT NÉGATIF
L'étude pointe en outre un impact négatif de l'obésité sur la sexualité plus fort chez les femmes que chez les hommes.
Certes quand elles ont un partenaire, l'activité sexuelle et le degré de satisfaction des femmes obèses sont identiques à ceux des femmes de poids normal (IMC compris entre 18,5 et 25). Mais les obèses (IMC supérieur à 30) ont 30 % de moins de chances d'avoir eu un partenaire sexuel dans les douze derniers mois, quel que soit leur âge. Leur obésité semble peser dans le choix de leur partenaire : dans 67 % des cas, il est obèse (ou en surpoids) lui aussi, alors que les hommes obèses sont, eux, 39 % à avoir une partenaire au poids élevé ou très élevé.
Le poids a aussi un impact sur la sexualité des hommes : les obèses sont plus nombreux à souffrir de dysfonctionnements sexuels et, chez les plus jeunes, à contracter des infections sexuellement transmissibles. Des problèmes que ne connaissent pas plus les femmes obèses que les autres.
L'obésité joue sur les comportements : si les femmes obèses ont autant recours à la contraception que celles de poids normal, elles sont en revanche plus nombreuses à utiliser des méthodes moins efficaces, comme le retrait. Et puis, même avec un partenaire, elles sont moitié moins à considérer la sexualité comme une composante importante de leur équilibre personnel.
MOINDRE RECOURS AUX MÉDECINS
Pour les auteurs de l'article, la pression sociale et une plus faible estime de soi peuvent expliquer ces différences. "La stigmatisation est tellement forte pour les femmes obèses qu'il est logique qu'elles soient pénalisées aussi dans leur sexualité, et par exemple qu'elles rencontrent des difficultés à trouver un partenaire", explique la sociologue Nathalie Bajos.
L'image de leur corps pèse davantage sur les femmes que sur les hommes, et conduit à ce "rapport spécifique à la sexualité". Ce qui peut expliquer le moindre recours pour leur contraception aux médecins, devant lesquels il faut se déshabiller. Cela peut expliquer, aussi, le fait qu'elles soient plus nombreuses à trouver leur partenaire sur Internet, où elles peuvent cacher leur poids, mais aussi visionner des films pornographiques.
Les auteurs de l'article concluent que face au phénomène de l'obésité, il faut envisager la sexualité de ces femmes comme un enjeu de santé publique. Il faudrait ainsi accentuer la prévention des grossesses non désirées, d'autant qu'être enceinte comporte plus de risques pour les femmes obèses que pour les autres. Cela pourrait passer, notamment, par une meilleure prise en compte de la sexualité elle-même lors des consultations médicales, où il semble en être encore peu question.
Laetitia Clavreul
mercredi 16 juin 2010
L'obésité a un impact sur la sexualité des femmes
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