L’appel au feu risque d’entraîner des surréactions dont les marchés sont les habitués, sans compter les prophéties autoréalisatrices. Lire A Orlean par les temps qui courent serait salutaire pour comprendre le fonctionnement des marchés érigés en juges de paix de nos politiques économiques.
dimanche 17 juin 2012
Week-end de tous les dangers : l'euro est-il entré en phase terminale ?
Flambée des taux d'intérêt, tensions en
sein du couple franco-allemand, élections législatives chaotiques en
Grèce... ce week-end est-il celui de la dernière chance pour l'eurozone ?
Le ciel se couvre sur la zone euro de nuages
aussi lourds et insistants que ceux qui défigurent notre été
désespérément absent. Mais si le lyrisme n’est pas de mise, nous n’osons
pas dire pour autant que la zone euro joue son avenir.
En
effet, depuis 2009, début de la crise grecque nous l’avons entendu un
nombre incalculable de fois. Les sommets de la dernière chance, et j’en
passe, qui devaient éteindre l’incendie n’ont été que l’action de
pompiers pyromanes résolus à préparer la prochaine crise. Les
jours à venir peut-être seront un coup de butoir supplémentaire, voire
le dernier, à l’édifice de l’euro si l’on encore on peut parler
d’édifice, mais aussi peut être une chance pour l’Europe. La proposition peut paraître paradoxale et folle. Mais elle mérite un petit détour.
A première vue, rien ne peut aller dans le sens de cette proposition. Le couple franco-allemand est au bord du divorce.
Madame Merkel fustige la médiocrité de certains propos en matière de
stratégie économique. En somme, elle tance tout ce qui rejette la
rigueur. M. Ayrault n’a pas de mots tendres pour la position allemande
qu’il juge par bien des aspects contreproductive. M Hollande tente un rapprochement avec M. Monti pour promouvoir un plan de croissance.
Le président du conseil italien voit les taux intérêt de la dette
italienne prendre une direction inquiétante et se propose même de vendre
des biens nationaux.
L’Espagne ne se porte guère mieux, plombée par ses banques et mise à genoux par son chômage de masse et emprunte autour de 6%.
Chypre, le Portugal sont les prochains candidats au précipice. Et les
grecs s’apprêtent peut être à donner la majorité à un gouvernement prêt à
remettre sur la table les conditions d’octroi des plans dit d’aide à la
Grèce. C’est donc un week end à zyudcoote pour paraphraser le livre de
R. Merle qui fait récit de la bataille de Dunkerque, qui se prépare plus
qu’une quelconque espérance.
Pourtant nous nous
refusons à souffler sur les braises sans pour autant ignorer la gravité
de la situation. En économie, la confiance est clef et force est de
constater que l’austérité à tous les étages, les plans de
restructuration à répétition, les traités TSCG et autres, les fonds de
solidarité financière ont peine à redonner espoir aux peuples ou
confiance aux investisseurs.
L’appel au feu risque d’entraîner des surréactions dont les marchés sont les habitués, sans compter les prophéties autoréalisatrices. Lire A Orlean par les temps qui courent serait salutaire pour comprendre le fonctionnement des marchés érigés en juges de paix de nos politiques économiques.
L’appel au feu risque d’entraîner des surréactions dont les marchés sont les habitués, sans compter les prophéties autoréalisatrices. Lire A Orlean par les temps qui courent serait salutaire pour comprendre le fonctionnement des marchés érigés en juges de paix de nos politiques économiques.
Mais
éclairons notre position. Le week end qui s’annonce va être politique
et dans toute cette affaire il s’agit de politique, mais au sens noble
du terme c’est à dire qui concerne la vie de la cité. Les peuples vont parler alors que tout se lie pour qu’ils se taisent.
La France va probablement offrir à l’actuel président de la république
une majorité pour gouverner, et les grecs vont s’exprimer. Mais l’Union économique et monétaire tremble car le parti de gauche de M Tzypras pourrait l’emporter.
Ce dernier refuse les plans à l’œuvre et souhaite demeurer dans l’euro
mais à d’autres conditions. Après tout, acceptons l’événement, le
surgissement d’autre chose. Si le Pasok et Nouvelle Démocratie
obtiennent la majorité des sièges, chacun criera l’euro est sauvé, en
attendant la prochaine crise qui ne manquera pas d’arriver rapidement.
De
toutes les manières, les plans proposés depuis trois ans pour sauver la
zone n’aboutissent pas, mettent en place un fédéralisme autoritaire,
une coordination négative, éloignent les peuples de l’Union, n’apportent
pas la croissance et l’emploi. Et il faudrait les continuer , c’est
quelque peu absurde.
La Grèce peut être dimanche soir le meilleur allié de l’union car si le vote du peuple grec intime le changement, ce vote n’échouera pas dans le vide.
L’Italie, la France, l’Espagne avec leurs différences comprennent que
le cocktail réformes structurelles et assainissement budgétaire ne sont
pas les bonnes réponses du court et moyen terme. Il ne s’agit pas de
croire que certaines réformes ne doivent pas être faites. Mais il
convient de voir que leurs effets sont discutables et incertains.
L’OCDE
dans une étude du mois de juin 2012 « perspectives de l’OCDE sur les
pensions 2012 » révèle que les réformes des retraites mise en œuvre dans
28 des 34 pays de l’OCDE se soldent par une baisse des 20 à 25 % des
prestations. Les réformes structurelles qui ont affecté les
marchés du travail italien, français, allemand , portugais ,espagnol ont
eu pour conséquence d’accroître la dualisation de ces marchés sans
apporter réponse au chômage. Une société de plein emploi quand bien même on y parviendrait n’aurait de sens que si l’emploi proposé est digne.
En l’état, la zone euro est dans l’impasse.
Recréer le Merkozy, faire courber les grecs davantage alors qu’ils ont
les yeux déjà près du sol, ligoter davantage la souveraineté des peuples
ne changeront rien et ne donneront pas plus de vie à la zone euro, ce serait l’extension des moyens palliatifs et rien d’autre. Que ce week end illustre les vertus de la confrontation et non de l’affrontement.
L’Europe est dans les pièges d’un conservatisme terrible il ne s’agit
pas pour nous de dire qu’elle doit s’appuyer sur un endettement
inconsidéré ou oublier les impératifs de compétitivité ou de
productivité, mais la voie pour y parvenir n’est pas la bonne.
L’Allemagne doit accepter de rejoindre le débat car la crise va la gagner
« Même si les commandes en provenance des pays hors zone euro restent
dynamiques (3,6 % début 2012), le poids de la zone euro reste trop fort
pour que les exportations vers les pays émergents puissent compenser le
recul des commandes adressées par la zone euro à l’Allemagne, ce qui se
répercutera inévitablement sur la croissance allemande. Le PIB devrait
donc progresser moins rapidement en 2012 qu’en 2011 (0,9 % selon
l’OFCE[3], après 3,1 %). L’Allemagne échapperait donc à la
récession sauf si la contraction budgétaire devait s’amplifier dans
l’ensemble de la zone euro. » Comme le souligne une stimulante note de l’OFCE le 13 juin.
La
Grèce nous a offert il y a bien longtemps un legs : celui de la
démocratie. Ce principe est celui d’un homme = une voix, dans sa version
moderne. Sur les marchés, ce principe n’existe pas. Ce week-end soyons athéniens, retrouvons l’amour de l’agora, discutons d’Europe.
Et place à la divergence et tant pis pour les consensus mortifères
faits d’austérité impossible et de croissance différée, l’Europe vaut
bien une saine querelle.
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