TOUT EST DIT

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jeudi 24 février 2011

Une petite puissance régionale

En appelant à des sanctions économiques contre la Libye, le président de la République a voulu faire un geste pour condamner l’intolérable. L’arme de rétorsion est classique. On pourrait presque dire trop classique tant la répression qu’elle prétend sanctionner dépasse largement le répréhensible pour baigner dans le crime et patauger dans le sang. On pourrait dire presque trop déplacée, pourtant, trois ans après que Paris eut déroulé le tapis rouge à Mouammar Kadhafi en espérant recevoir en retour de cet honneur baroque - et de la promesse d’une coopération sur le nucléaire civil ! - quelques milliards de contrats qui ne vinrent jamais. Guère effrayante pour le «Guide» paranoïaque de Tripoli, la punition française n’est même pas parvenue à faire l’unanimité dans l’Europe des 27.

Toutes les limites d’une politique étrangère apparaissent tout à coup, en relief, sur la carte des rapports de forces à la lumière de la troisième révolution du monde arabe méditerranéen en seulement deux mois. La France savait, depuis que Valéry Giscard d’Estaing le lui avait avoué, qu’elle était une puissance moyenne, mais elle continuait d’occuper une place unique sur l’échiquier planétaire. Elle comprend aujourd’hui qu’elle n’est plus qu’une petite puissance, plus reconnue pour le rayonnement de sa culture, de son art de vivre et de son mode de vie, que pour son influence sur les évolutions planétaires du XXI e siècle. Un douloureux constat qu’un groupe de diplomates, de droite et de gauche, a attribué sans prendre de gants - dans une tribune publiée dans Le Monde - aux stratégies velléitaires et aux coups par coups sans vision de l’Élysée autant qu’à l’amateurisme et aux objectifs de politique intérieure (suprême injure…) de ceux qui les conçoivent auprès du chef de l’État. Alain Juppé et Hubert Védrine n’avaient-ils pas déjà mis en garde, en juillet 2010, contre la casse du bel outil que représente le quai d’Orsay ?

Le jugement du «groupe de Marly» est encore plus sévère. Si l’affaiblissement de la voix de la France est mis au jour par son apathie devant l’effondrement des régimes dictatoriaux de Tunisie et d’Égypte, il n’est cependant pas exclusivement imputable à Nicolas Sarkozy. Il faut remonter à 1991 et aux hésitations de François Mitterrand devant l’effondrement du monde bipolaire né la seconde guerre mondiale pour en trouver les origines. Depuis vingt ans, la diplomatie française avait encore su montrer sa différence dans des moments clé comme en 2003 avec le refus de s’engager dans la guerre en Irak. Mais la dilution volontaire de sa politique arabe, depuis 2007, sa réintégration dans le commandement de l’Otan, symbole d’un alignement sur les États-Unis, et son désintérêt pour l’Afrique ont accéléré son effacement de fait. Toute l’œuvre gaullienne est à terre.

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