TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

dimanche 30 janvier 2011

"Nous n'avons pas peur, la justice est de notre côté"

Des dizaines de milliers d'Egyptiens sont descendus à nouveau dans la rue vendredi. Les forces de police ont violemment repoussé les manifestants donnant lieu à des scènes de guérilla urbaine au Caire et dans plusieurs villes d'Egypte. 


Devant la mosquée Moustafa Mahmoud, dans le quartier cossu de Mohandessin, la rue est noire de monde: des jeunes des classes aisées, en majorité venus assister à la prière du vendredi. "Je respecte votre choix de descendre dans la rue, et je soutiens le combat pour la démocratie", lance l'imam dans son prêche, sous les applaudissements de la foule. Puis hommes et femmes s'alignent pour prier, les invocations divines entrecoupant un silence tendu. Juste après avoir murmuré les dernières prières, les fidèles se lèvent comme un seul homme, sortent pancartes et drapeaux égyptiens, et se mettent à chanter des slogans avec force, en avançant vers le cordon de policiers anti émeutes qui entoure la mosquée. "Illégitime!", crient-ils à l'intention de leur gouvernement. "Le peuple veut faire tomber le régime!" Le cordon policier cède rapidement devant la foule des manifestants.
Le cortège - entre 3 et 5 000 personnes - parcourt ensuite la ville en suivant le même trajet que mardi. Les habitants des quartiers de Mohandessin et Doqqi sortent sur leurs balcons pour regarder passer la foule, mi éberlués, mi euphoriques. "Descendez! Descendez!" leur crient les manifestants. "Nous n'avons pas peur, nous devons aller au bout, la justice est de notre côté", affirme Ahmed, responsable marketing de 35 ans, qui manifeste pour la première fois de sa vie. "Nous voulons la liberté politique, de vraies mesures contre la pauvreté, un système de sécurité sociale", énumère Rime, 24 ans, étudiante en médecine, qui touchera 800 livres (environ 100 euros) maximum par mois une fois ses études terminées. Mardi, elle avait rejoint spontanément le cortège qui passait sous ses fenêtres. "A l'hôpital public où je travaille, je vois des gens mourir, simplement parce qu'ils n'ont pas les moyens de payer les soins", explique la jeune fille, qui porte un voile rouge. Elle est venue avec deux amies, également étudiantes. "Liberté! Liberté!", s'époumonent les trois jeunes filles.

"Il n'y a pas de retour en arrière possible"

Arrivé face au pont Galaa, qui permet d'accéder à Midan Tahrir ("Libération"), la place centrale du Caire, le cortège bute sur de nouveaux cordons de policiers anti émeutes. Les gaz lacrymogènes commencent à pleuvoir pour disperser la foule. Au même moment, les autres cortèges qui convergeaient vers la place Tahrir se retrouvent aussi bloqués. Des scènes de guérilla urbaine remplacent bientôt les manifestations pacifiques: aux gaz lacrymogènes et canons à eau, répondent des jets de pierres et cocktails molotov. Des incendies se déclarent en plusieurs points de la capitale égyptienne: le bâtiment du parti au pouvoir est en feu. Puis les tanks de l'armée commencent à apparaitre dans les rues pour la première fois depuis le début du mouvement de protestations. Certains manifestants applaudissent les militaires, espérant qu'ils prendront parti pour la population, comme en Tunisie. Après la tombée de la nuit, des tirs fournis d'armes à feu retentissent dans le centre ville du Caire, les habitants sont paniqués, La ville semble en état d'insurrection. Le couvre feu est décrété à 18 heures. Vers 20 heures, les tirs se calment enfin.

Le Caire craint un scénario à la tunisienne
envoyé par france24. - Regardez les dernières vidéos d'actu.
A Alexandrie, Suez, Mansoura, et dans d'autres villes d'Egypte, des manifestations similaires ont eu lieu vendredi, débouchant sur les mêmes affrontements. "Moubarak ne va pas quitter le pouvoir, mais il va être obligé de changer de politique", estimait vendredi Salma, 28 ans, venue manifester avec sa mère. Le président égyptien a finalement fait une déclaration à la télévision publique dans la soirée, annonçant un remaniement ministériel. Quant à Mohamed El Baradei, rentré en Egypte jeudi soir pour rejoindre les manifestants, il n'a pas pu réaliser son projet: la mosquée dans laquelle il était allé prier a été assiégée par la police, interdisant à l'ancien diplomate d'en sortir. Il a ensuite été brièvement arrêté. "Il n'y a pas de retour en arrière possible", avait-il déclaré la veille. Il venait de proposer de prendre la tête d'un gouvernement de transition, si le peuple lui demandait. "Manifester pacifiquement est le droit absolu de chaque Egyptien. J'espère que le régime va cesser d'utiliser la violence, de détenir les gens, de torturer les gens", avait-il affirmé jeudi soir, se posant clairement en possible leader de la protestation. "El Baradei peut jouer un rôle de négociateur avec le gouvernement et tenter de réduire le nombre de victimes des affrontements", estimait vendredi Bahaa, 52 ans, un médecin présent dans le cortège. Encore faut-il que le régime égyptien accepte d'ouvrir un dialogue avec les manifestants.

0 commentaires: