Son retour met fin à deux décennies d'exil, depuis la répression de son parti en 1989, après des législatives où Ennahda avait recueilli 17% des suffrages. Il s'était alors réfugié en Algérie puis en Angleterre. En 1992, la justice tunisienne l'a condamné à la prison à vie par contumace tunisienne avec d'autres leaders religieux. Grâce à l'amnistie générale prononcée par le gouvernement de transition après la chute de Ben Ali, Rached Ghannouchi a de nouveau droit de cité.
Sous les acclamations de ses partisans et le discret encadrement de la police, le presque septuagénaire s'est ensuite frayé un chemin vers la sortie de l'aéroport, pour une destination inconnue. Nerveuse, l'équipe de sécurité de son parti tentait de le protéger de la bousculade en criant « ne le touchez pas ! ne le touchez pas ! ».
Chant musulman, cohue et « Allah Akbar ! » à pleins poumons, les partisans de Ghannouchi ont tout de même pu laisser éclater leur « fierté islamique ». « Je suis tellement heureuse de le ramener à la maison. Jamais je n'aurais pensé revoir mon frère vivant », a confié la soeur du leader islamiste, Jamila.
D'un côté la liesse, de l'autre l'inquiétude. Un peu en retrait, plusieurs dizaines de défenseurs de la laïcité ont tenu malgré tout à être présents à l'aéroport avec des pancartes contre le fondamentalisme. Maquillée, cheveux dénoués, jupe au-dessus des genoux, une jeune femme a passé le message à sa façon : elle s'est peint au feutre une moustache et une barbe sur le visage, parce « qu'avec les islamistes, il faut être un homme pour exister ».
Au moment du départ de Londres, Ghannouchi avait voulu « la jouer modeste » : « je rentre à la maison aujourd'hui, mais je retourne aussi dans le monde arabe », avait-il assuré.
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