TOUT EST DIT

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lundi 3 janvier 2011

L'Europe au bord du précipice

On dit que l'Europe se nourrit de ses crises, qu'elle n'avance que par convulsions. C'est vrai depuis sa création.

La cause de cette construction erratique tenait à une tendance naturelle : de vieilles nations n'abandonnent pas sans déchirements une partie de leur souveraineté. Ces crispations provoquaient des crises, qui se soldaient par des négociations marathon, qui finissaient par déboucher sur un accord - plus ou moins bon - qui redonnait un peu de crédibilité à l'idée européenne et un peu d'élan aux Européens convaincus.

Mais cette façon d'avancer par saccades et par rapports de force finit à la longue par user les gouvernants et désespérer les observateurs. Surtout quand une crise économique plus forte survient et qu'elle révèle la faiblesse des fondations européennes. L'euro même, la grande oeuvre de cette Europe qui a tant de mal à se faire, est menacé.

On s'aperçoit un peu tard qu'une monnaie commune, dans un continent aux fortunes économiques très diverses, peut difficilement être partagée. Difficile de répondre avec le même outil aux exigences et contraintes d'une Allemagne riche de son exportation, d'une Grèce riche de sa dette publique et d'une Irlande riche de sa dette privée. On se rend compte, toujours un peu tard, qu'une monnaie commune sans politique commune, c'est un marteau sans manche.

Les Chinois et les Américains utilisent leur monnaie comme une arme. Les premiers pour doper leurs exportations, les seconds pour financer leurs dettes. Les Européens, moins endettés que les Américains et moins exportateurs que les Chinois, ne sont pas en mesure de jouer de leur monnaie pour mieux vendre ou pour se protéger des rigueurs du marché.

Ils sont dotés d'une monnaie commune qui réussit l'exploit d'être aussi embarrassante qu'indispensable. Indispensable, parce que le retour aux monnaies nationales serait une catastrophe : les dettes de certains pays exploseraient, les échanges entre États membres s'effondreraient. Embarrassante, tant qu'une volonté politique ne se dégage pas pour en faire un instrument au service du développement commun.

2011 sera une année décisive pour notre monnaie commune. Et cette année cruciale s'ouvre par la présidence, pour six mois, de la Hongrie. Or il se trouve que ce pays n'a pas adopté l'euro, et qu'il n'a aucune expérience européenne puisqu'il a rejoint l'UE en 2004 seulement. Et comme si ces handicaps ne suffisaient pas, ce pays est actuellement aux mains d'un pouvoir populiste et nationaliste, ets'il était candidat aujourd'hui à l'adhésion à l'Europe, il serait refusé pour ses pratiques institutionnelles aux marges de la démocratie.

Il est vraiment temps de doter l'Union européenne d'institutions qui lui permettent d'élaborer et de mettre en oeuvre une politique commune. Ou, à défaut, de rassembler quelques pays capables, au sein de l'Union, d'avancer plus vite et de tirer derrière eux des nations plus faibles ou moins volontaires. Parce qu'à force de frôler le précipice, l'Europe pourrait finir par y tomber.

On se rend compte, toujours un peu tard, qu'une monnaie commune sans politique commune, c'est un marteau sans manche.

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