Devant faire face à une vague d’immolations par le feu, les autorités algériennes misent sur la baisse des prix des produits de base pour calmer la population qui regarde vers Tunis
C’est à Boukhadra, une bourgade algérienne frontalière de la Tunisie, qu’a débuté, le 15 janvier, au lendemain de la chute du président Ben Ali, cette série d’immolations, avec le geste tragique de Bouterfif Mohsen, 34 ans, sans emploi et père d’une fille. En réponse, le wali (préfet) de Tebessa a dissous le conseil communal de Boukhadra.
Une « mesurette » désemparée dans une situation des plus tendues, où la rumeur publique amplifie tous les jours le nombre des immolations par le feu. Chawki Amari, un chroniqueur satirique, a titré son article : « Le gouvernement va importer 30 millions d’extincteurs », soit approximativement la population algérienne.

"Nos dirigeants se “benalisent” un peu plus"

« Le gouvernement a traité la crise de janvier comme une conséquence de la hausse des prix des produits de base, poursuit-il. Il nous a “vendu” la baisse du prix de l’huile et du sucre comme la solution. Mais la crise continue. Les Algériens se suicident dans les rues. »
Le Trésor public a consenti un manque à gagner fiscal de 300 millions d’euros pour faire baisser d’environ 15 % le prix de ces deux produits de base. Pour Zoheir Oukil, universitaire, « le gouvernement sait que la situation est bien plus grave, il cherche à gagner du temps avec des mesures techniques sur les prix ».
L’autre riposte, face à la colère montante, est politique. Le wali d’Alger a interdit une marche dont la demande a été déposée pour samedi 22 janvier par le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD). Or, le parti du docteur Sadi a décidé de maintenir son mot d’ordre. « Ceux qui attendaient l’esquisse d’un geste vers une ouverture après ce qui est arrivé en Tunisie sont désarçonnés, explique Fouad Belmekki, militant pour le changement démocratique. Nos dirigeants font l’inverse, ils se “benalisent” un peu plus ».

L’accès à Facebook est devenu lent

L’ancien premier ministre, démissionnaire sous Bouteflika, Ahmed Benbitour a appelé au rassemblement de toutes les initiatives pour le changement. « Nous savons que nous devons lâcher du lest, mais cela ne doit pas se faire sous la pression des événements de Tunisie », rapporte une source proche du DRS, le bras sécuritaire et politique de l’armée.
Dans un tel contexte, il reste au pouvoir algérien à jouer de ses excédents financiers pour inonder le pays d’importations subventionnées, comme celles de blé tendre. Et à regarder vers sa frontière pour bien s’assurer que la révolution tunisienne n’essaime pas trop vite.
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