En politique européenne, il est toujours difficile de faire la part du « vrai » de celle du « flou »... appelé à devenir un jour du « vrai ». Rien d'étonnant si le citoyen a du mal à comprendre cette succession de compromis sur des compromis arrêtée hier à Bruxelles. Ainsi, que retenir de ce Conseil ? La mini-réforme du traité de Lisbonne présentée en paravent ? Ou - enfin - une timide ébauche d'un gouvernement économique de la zone euro ?
Théoriquement, la réforme du traité et la future gouvernance économique sont liées. Pour ne pas être démentie par sa Cour constitutionnelle, l'Allemagne doit obtenir un amendement au texte de Lisbonne qui autorisera en quelque sorte la création d'un « Fonds exceptionnel provisoire permanent » destiné - pour la sauvegarde de l'euro - à venir en aide aux États en difficultés, comme la Grèce au printemps dernier.
Et, mais c'est encore à voir, les fauteurs de la crise - banques, fonds spéculatifs... - devraient être associés à ce mécanisme. Toutefois, pour ne pas ouvrir la porte à tous les laxismes, les pays en délicatesse avec les critères de Maastricht risqueront de « vraies » sanctions. Or il est étonnant que la France, pourtant grande pécheresse question déficits, ait approuvé cette procédure dans la fameuse déclaration franco-allemande de Deauville qui a fait hurler les « petits » de l'UE.
En réalité, il y a un « lézard », et de taille : les sanctions, toujours du ressort de la Commission, seront désormais « automatisées »... et non plus « automatiques ». Traduction : l'ultime décision sera prise par le Conseil des chefs d'État et de gouvernement qui reprend ainsi la main sur la technocratie. Ce retour en force des politiques ressemblant fort à l'Europe « intergouvernementale » du passé ébranle aussi la tour d'ivoire de la BCE de Francfort.
Le nouveau « Fonds » ou « parapluie financier » quasi permanent taille par sa seule existence une brèche dans les doctrines monétaristes à la base de l'euro. Ce qui explique les échanges aigres-doux entre Jean-Claude Trichet et Nicolas Sarkozy à Bruxelles...
Mais que de compromis pour en arriver là ! Le « oui » des 27 à la difficile révision du traité de Lisbonne a pour une bonne part été obtenu en s'entendant sur une réduction du budget de l'UE. Au grand dam du Parlement européen qui, par ailleurs, dans un artifice juridique, serait plus ou moins écarté de cette révision. Et comment va réagir la Commission Barroso rabrouée dans ses pouvoirs ? Enfin, quelle sera en fin de course l'attitude des États qu'irrite le « directoire » franco-allemand ?
Il y a du tangage dans l'air avec quelques belles querelles byzantines en perspective... et très éloignées de cette « Europe transparente » promise aux citoyens de l'UE.
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