TOUT EST DIT

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mercredi 22 décembre 2010

La richesse des métiers


Y a-t-il un lien entre le monde des métiers et le destin des hommes ? Oui, si l'on écoute l'un des plus grands savants de l'histoire contemporaine, Albert Einstein, dont Jean d'Ormesson nous apprend, dans son dernier livre, qu'il aurait préféré être plombier. Le grand physicien allemand lança cette phrase énigmatique : « L'artisanat sauvera l'humanité. »


Sans doute voulait-il rappeler que c'est en se faisant artisan et en inventant les premiers outils que l'homme a assuré sa survie sur la Terre et que si, par malheur, un séisme ou la folie des hommes créait la désolation et le chaos, l'humanité pourrait espérer se remettre en marche par l'habileté, l'inventivité et le génie des « mains ».


Mais peut-être aussi le créateur de la loi de la relativité anticipait-il que la science, avec ses nombreuses découvertes, était capable de produire non seulement le meilleur, mais aussi, malheureusement, le pire. Et que, pour obtenir le meilleur, l'humanité devrait adopter une éthique et un mode d'organisation proches de l'artisanat.


Précisément, quel est ce modèle ?


C'est d'abord le parti pris d'une économie pacifiée, certes basée sur la compétition, mais porteuse d'une richesse sociale qui donne des perspectives à la technologie et à l'économie. Un boulanger veut faire du bon pain parce qu'il connaît les personnes qui vont le manger. Un maçon veut faire une belle maison, aussi parce qu'il connaît les personnes qui vont l'habiter.


Ce type d'économie est aux antipodes d'une économie complètement dématérialisée, totalement virtuelle, où le profit devient la seule finalité et l'humain la variable d'ajustement. L'artisanat - et les valeurs qu'il illustre en matière économique - peut donc aider à inventer un nouveau modèle, où priment toujours la recherche, l'innovation et les découvertes technologiques, mais où l'individu retrouve une juste place.


Le modèle artisanal, c'est aussi une certaine idée du développement durable basée sur la proximité, les circuits courts, la durabilité des objets. La planète est, aujourd'hui, menacée par des excès qui ont progressivement transformé notre société de consommation en une société du jetable. Or, si nous voulons contrer les dangers que nous avons nous-mêmes créés, un autre modèle doit être adopté dans lequel la durabilité et la réparation des objets seront déterminants. C'est ainsi que l'on pourra passer d'une logique du plus à une logique du mieux.


Enfin, le modèle artisanal, c'est encore un certain rapport au travail, l'idée d'une réelle autonomie, d'une nécessaire créativité, où l'enthousiasme est possible. Il faut entendre le passionné cuisinier de Cancale, Olivier Roellinger, pour comprendre que le talent et l'esprit d'innovation peuvent aller de pair avec la passion et l'amour du métier.


Dans un monde où l'on s'interroge parfois pour savoir « si la vie vaut la peine d'être vécue », l'envie de se réaliser dans l'amour d'un métier est l'un des critères d'une vie réussie. Sans nul doute, si l'on veut réenchanter le monde et l'économie, comme cela apparaît urgent, il faut d'abord commencer par redonner du sens au travail. Sur ce terrain, l'artisanat a des solutions à proposer. Il n'a peut-être pas vocation à sauver l'humanité, mais il peut l'aider, dans une période de doute et d'incertitudes.




(*) Secrétaire général de la Chambre de métiers et de l'artisanat des Côtes-d'Armor.

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