TOUT EST DIT

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mardi 21 décembre 2010

La droite américaine 
a le vent en poupe

Les démocrates ont subi une raclée lors des élections de mi-mandat, en novembre, perdant la majorité à la Chambre des représentants et la capacité de blocage au Sénat. Effet immédiat, lors du vote sur la prolongation ou non des réductions d'impôts pour les riches, que le candidat Obama avait promis d'éliminer et qui arrivent à expiration fin décembre.

Les démocrates voulaient les garder seulement en dessous d'un revenu annuel de 250 000 dollars (190 000 €), mais ils ont accepté la demande républicaine de les maintenir pour tous.

Pour illustrer les victoires de la droite américaine, il faut regarder du côté de la Cour suprême. Sa composition avait changé sous le régime de G.W. Bush, et la plupart des choix se font à une courte majorité (5 contre 4). Mais c'est une transformation idéologique plus profonde qu'il faut examiner.

Une première décision importante de la Cour a eu lieu, en janvier 2010, dans l'affaire Citizens United. L'arrêt de la Cour affirmait que des corporations (et des syndicats) sont des « personnes », aux yeux de la loi. Pour cette raison, la loi votée par le Congrès, en 2002, qui imposait des limites sur leurs contributions aux campagnes politiques, serait une atteinte au premier amendement à la Constitution qui garantit la liberté de la parole. C'est ainsi qu'on a vu, en novembre, des candidats bien financés surprendre des députés établis.

Mais, pour expliquer la montée des populistes du Tea Party, il faut y voir l'idéologie d'un individualisme débridé qui fait fi de ses effets sur la société. On l'a vue pendant les dix-huit mois où l'on a débattu de la réforme du système des assurances santé.

Très vite, le Président a dû abandonner l'idée d'une couverture nationale : le compromis final a établi des assurances privées auxquelles tout citoyen doit adhérer. Cette obligation est la base de l'idée d'une assurance qui vise à compenser le risque d'accidents. Or, les chantres de l'individualisme y voient surtout une entrave à leur liberté.

Comme nous sommes aux États-Unis, la question aboutira éventuellement à la Cour suprême. En attendant, une Cour fédérale, en Virginie, vient de déclarer que l'obligation de s'assurer est contraire à la Constitution. En effet, le gouvernement a la responsabilité de réglementer les activités commerciales ; il peut donc réglementer les compagnies d'assurance. Mais le citoyen qui n'achète pas une police d'assurance n'engage aucune activité ; et voilà qu'on menace de le pénaliser pour cette « non-activité » ! Alors, affirme la Cour, le gouvernement s'accorde une autorité « sans limites » sur la liberté de l'individu. Va-t-on lui imposer l'obligation d'«acheter une voiture, adhérer à un club de gym, manger des asperges » ? Non ! Il faut protéger l'individu avant tout.

Cette idéologie a porté le succès républicain. Elle convainc beaucoup d'Américains que Barack Obama est un « socialiste », et qu'il veut contrôler et diriger la société entière à partir de Washington. En effet, si le gouvernement peut imposer l'achat d'une assurance santé, pourquoi ne m'imposerait-il l'obligation de faire plus d'exercices... ou de manger des asperges ?

Comment Barack Obama et les démocrates pourront-ils contrer ces idéologues ? Après tout, une assurance est aussi une expression de la solidarité des citoyens les uns avec les autres. Une piste pour Obama ?



(*) Professeur émérite à Stony Brook University, New York, auteur d'Aux origines de la pensée politique américaine (Pluriel).

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