Des lycéens et des étudiants se sont associés aux manifestations contre la réforme des retraites. Le plus poignant n'était pas leurs slogans sur la réforme, mais plutôt ce que leur mobilisation nous disait sur autre chose : la détérioration des conditions de vie de la jeunesse, dont le taux de pauvreté s'accroît régulièrement et dont l'insertion professionnelle devient un parcours du combattant. Face à une désespérance qui pointe, il faut oser penser l'avenir, d'abord en ouvrant les chantiers de prévoyance sociale, exclus de la réforme des retraites au sens strict. Sur ces chantiers, les négociateurs - État, syndicat et patronat - trouveraient du « grain à moudre ».
Le premier chantier découle de l'augmentation de l'espérance de vie en bonne santé. Réduire la durée moyenne de la période qui, en fin de vie, se traduit par de lourds problèmes de santé (période sensiblement plus longue pour les femmes que pour les hommes), voilà un chantier gagnant-gagnant : pour le régime d'assurance maladie, sachant que les dépenses de santé les plus importantes concernent ce moment de la vie, et, bien entendu, pour les retraité(e)s. La bataille de l'augmentation de l'espérance de vie en bonne santé se joue aussi dans le monde du travail : par l'aménagement du cadre de vie professionnel, notamment en fin de carrière ; par une meilleure prise en compte de la vie familiale dans les entreprises.
Le deuxième chantier, inséparable du précédent, concerne l'assurance dépendance. Des études européennes montrent que des solutions inspirées par la solidarité, impliquant notamment les régimes d'assurance complémentaire, peuvent assurer une large couverture et être moins coûteuses pour la collectivité. L'enjeu, c'est de rendre les partenaires sociaux et les retraités intéressés à l'amélioration de l'espérance de vie en bonne santé, ce qui implique de garder le financement de la dépendance dans un cadre professionnel.
Le troisième chantier est de rendre flexibles les fins de carrière et, plus généralement, les perspectives d'emploi des seniors. Allonger la durée de la vie active serait facilité en diminuant progressivement l'activité principale pour développer d'autres possibilités, rémunérées ou non. Le temps des retraites couperets est anachronique, toujours lié à l'idée que les métiers sont homogènes et que chaque actif vaut un autre actif ; elle ne correspond plus au monde du travail tel qu'il est aujourd'hui. L'ouverture, en 2013, d'une réflexion sur la retraite par points va dans le sens de cette souplesse, en même temps qu'elle ouvre le dossier délicat de l'unification des régimes.
À ce dernier chantier pourrait être relié un quatrième, entre générations, celui de l'accueil en alternance des jeunes dans l'entreprise. Un goulot d'étranglement de cette pratique s'est formé dans notre pays, devant les possibilités d'accueil et d'encadrement par les entreprises. Ne serait-ce pas, justement, une tâche pour des seniors, prolongeant utilement de cette façon leur vie active ?
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