Le chef de l'État se rendra fin juin, après une première rencontre en avril, dans la circonscription du président du MoDem.
«Voyons-nous !» C'est Nicolas Sarkozy qui a fait le premier pas. François Bayrou n'a pas hésité pour saisir la main que lui tendait son meilleur ennemi. Fut-ce le président de la République ! Celui-là même qu'il avait étrillé dans son livre pamphlet, Abus de pouvoir, publié en 2009. Isolé comme jamais, le président du MoDem n'a sans doute plus les moyens de refuser cette bouée de sauvetage. Sous peine de voir s'envoler ses derniers espoirs de rebondir d'ici à 2012 où il compte bien concourir à l'élection présidentielle pour la troisième fois consécutive.
Le 22 avril dernier, Nicolas Sarkozy et François Bayrou ont donc repris langue en toute discrétion. Un premier tête-à-tête inattendu après presque trois ans d'affrontements permanents. «Qu'ils se voient, ce n'est pas anormal. Ils se connaissent tellement bien et depuis si longtemps», insiste-t-on à l'Élysée. Nicolas Sarkozy (55 ans) et François Bayrou (59 ans) ont commencé la politique en même temps, appartenu aux mêmes majorités et servi dans le même gouvernement (celui d'Édouard Balladur). Leur divorce date de 1999 quand ils se sont affrontés aux européennes. La suite est archiconnue. Le candidat de l'UMP a gagné son bras de fer avec son rival centriste.
Depuis le début de quinquennat, le chef de l'État n'a jamais raté une occasion de lui enfoncer toujours plus la tête sous l'eau. Lors des municipales de 2008, Nicolas Sarkozy mettra tout en œuvre pour faire battre François Bayrou, candidat à Pau. Quitte à investir, sous couvert d'ouverture, le maire PS sortant Yves Urieta. L'objectif étant d'atomiser le poids électoral du troisième homme de la campagne de 2007.
Mais tout ça relève du passé. À deux ans de la présidentielle, le chef de l'État change son fusil d'épaule. S'il redonne de l'oxygène à l'élu béarnais ce n'est pas du tout par charité chrétienne mais pour des raisons de stratégie électorale. Nicolas Sarkozy préfère que le créneau du centre soit occupé par un rival très affaibli plutôt que par un de ses ministres (Hervé Morin ou Jean-Louis Borloo) susceptibles en plus de capter des voix à l'UMP. En outre, Bayrou peut ravir quelques voix à gauche. «Morin n'est pas un centriste mais un républicain indépendant et Borloo un radical dans le style IIIe République», commente-t-on à l'Élysée. Les sarkozystes se réjouissent du changement de ton de Bayrou : «Au “Grand Jury”, il avait l'air plus calme. On sent qu'il a tiré les leçons de ses échecs répétés depuis 2007.»
«Ne pas être méchant»
Consignes ont été données à l'UMP de ménager le centriste. «La règle maintenant, c'est de ne pas être méchant, explique un cadre du parti. Voire d'en dire du bien.» Les porte-parole s'exécutent donc. «À partir du moment où François Bayrou ne fait plus de l'antisarkozysme et laisse à penser qu'il ne cherche plus d'accord avec le PS, il retrouve la place qui était la sienne à l'origine», essaye Dominique Paillé. Pas de rancœur qui tienne donc. «En politique, il faut être magnanime. Nous savons pardonner», ajoute l'ex-UDF.
Au Nouveau Centre (NC), la circonspection domine. «On extrapole beaucoup sur ses faits et gestes, estime le numéro 2 du NC Jean-Christophe Lagarde, qui «n'exclut pas un énième revirement.» «Ce que j'ai annoncé en 2007 s'est vérifié exactement, confie Hervé Morin. Bayrou a tenté des ouvertures à gauche et la gauche lui a claqué la porte au nez.» Sont-ils prêts à refaire campagne pour Bayrou ? «Non, bien sûr que non, j'ai déjà donné, avertit Lagarde. Après les électeurs, nous avons été, en 2007, les plus cocus de Bayrou. »
Si l'objectif de Sarkozy était de semer la zizanie chez ses alliés du Nouveau Centre, la manœuvre est en passe de réussir. Prochaine vexation : le 22 juin à Bordes, au cœur de la circonscription béarnaise de François Bayrou qui accueillera Nicolas Sarkozy. Pour cette deuxième rencontre en deux mois, le rapprochement sera scellé devant les caméras.
samedi 5 juin 2010
Sarkozy et Bayrou enterrent la hache de guerre
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