TOUT EST DIT

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vendredi 6 novembre 2009

Rama Yade de plus en plus isolée au gouvernement

"Les ministres iront là où on leur dira d'aller", avait prévenu Nicolas Sarkozy en août dernier. Il semble que le message présidentiel n'ait pas été bien entendu par Rama Yade, qui continue à jouer les trublions. Mais l'Elysée commence à se lasser de ses "sorties" à répétition. Une "indiscipline" qui pourrait lui coûter son poste au gouvernement.
Courant d'octobre, alors que l'Elysée et Valérie Pécresse, la ministre de la recherche et tête de liste UMP pour les élections régionales en Ile-de-France, affinent le casting des têtes de liste par département, l'affaire de la candidature de Jean Sarkozy à la tête de l'Etablissement public d'aménagement de la Défense (EPAD) fait tanguer l'UMP. Rama Yade se fait alors remarquer en s'écartant du conciliant argumentaire gouvernemental, avant de rentrer dans le rang quelques jours plus tard. Une attitude qui ne passe pas inaperçue à l'Elysée.

Dans le même temps, Rama Yade, qui est également la porte-parole de campagne de Mme Pécresse, est pressentie pour prendre la tête de la liste UMP dans le Val-d'Oise plutôt que dans les Hauts-de-Seine, où elle souhaitait se présenter. "Rama Yade dans le Val-d'Oise fera bien plus couleur locale que dans les Hauts-de-Seine", lâche en "off" une responsable UMP. Rama Yade répond alors qu'elle refuse ce "parachutage ethnique". Conseillère municipale d'opposition à Colombes (92), elle en profite pour rappeler qu'elle est "élue des Hauts-de-Seine" et par conséquent bien placée pour y conduire la campagne de l'UMP.

"RAMA YADE VA DANS LE SENS DE L'OPINION PUBLIQUE"

Deux semaines plus tard, la secrétaire d'Etat se démarque à nouveau lors du vote d'un amendement prévoyant la suppression du droit à l'image collective (DIC) des athlètes professionnels. Cette mesure, qui mettra fin à une exonération de charges sociales des sportifs professionnels (footballeurs, rugbymen, basketteurs) et devrait rapporter 138 millions d'euros à l'Etat, est soutenue par Roselyne Bachelot, la ministre de la santé et des sports et ministre de tutelle de Rama Yade. Cette dernière ne l'entend pas ainsi et prend le contre-pied du gouvernement, en jugeant la suppression du DIC "dangereuse" pour "la compétitivité du sport français". Cette prise de parole va amorcer une semaine d'emballement médiatique pour la jeune secrétaire d'Etat.

Ces petites phrases commencent à agacer ses collègues du gouvernement. Le ministre du budget, Eric Woerth, dégaine le premier dans les colonnes du Figaro : "Rama Yade va dans le sens de l'opinion publique et de sa propre clientèle. Ce n'est pas très courageux. Ce n'est pas à un secrétaire d'Etat de dire à son ministre de tutelle ce qu'il doit faire. Des arbitrages gouvernementaux avaient été rendus et elle devait s'y tenir." Le lendemain, face aux caméras de Canal +, c'est au tour de Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et membre de la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy, de faire passer un message on ne peut plus clair à sa collègue : "Quand on n'est pas d'accord avec la politique menée par le gouvernement, c'est simple : ou on ferme sa gueule, ou on démissionne."

"J'AI UNE HAUTE IDÉE DE LA POLITIQUE ET CE N'EST PAS CELLE-LÀ"

La riposte de Rama Yade ne tarde pas à fuser : "En politique, on ne répond pas en descendant à ce niveau-là, répond-elle le 2 novembre. J'ai une haute idée de la politique et ce n'est pas celle-là." Le soir même, sa marionnette fait son entrée aux Guignols de l'info de Canal +. Puisque l'avertissement de Nadine Morano n'a pas calmé l'ardeur de Rama Yade, c'est François Fillon qui s'y colle le 3 novembre : "J'ai fait savoir à la secrétaire d'État ce que je pensais de la méthode qui consiste à se désolidariser de son ministre. Il faudra en tirer les conséquences le moment venu." Jeudi 5 novembre, Nicolas Sarkozy enfonce le clou : "Il y a un moment donné où il faut travailler en équipe, ou alors, ce n'est pas possible."

Au sein du gouvernement comme à l'Elysée, les soutiens à Rama Yade semblent rares. "Indisciplinée" pour les uns, elle est jugée "enfant gâtée" par les autres. "Il y a deux ans, elle était administratrice au Sénat, elle est secrétaire d'État pour la deuxième fois, on lui propose un poste éligible aux régionales. Comme horreur en début de carrière, il y a pire", a ironisé Eric Besson, le ministre de l'immigration. Pas rancunière, Roselyne Bachelot, pour sa part, juge "clos" l'incident sur les DIC : "Dans une équipe gouvernementale, il faut jouer collectif. Je le lui dis avec beaucoup d'amitié et de gentillesse et en me comportant comme une grande sœur."

Valérie Pécresse a réitéré, le 3 novembre sur Europe 1, sa proposition de faire de sa collègue la tête de liste dans le département du Val-d'Oise. Mais, deux jours après cette main tendue, Rama Yade n'a toujours pas répondu. Ni à Valérie Pécresse ni à Michèle Sabban, la vice-présidente PS de la région Ile-de-France, qui a offert, mercredi 4 novembre, le "droit d'asile" à la secrétaire d'Etat aux sports, lui proposant de conduire la liste PS aux régionales dans les Hauts-de-Seine. "Une blague", a-t-on précisé depuis au PS.

L'avenir immédiat de Rama Yade semble pour le moins incertain. Pourtant, selon le baromètre BVA-Orange, elle demeure la "personnalité star" des Français, alors que la cote de popularité du président de la République décline. "Attaquer Nicolas Sarkozy lorsque l'on est dans l'opposition mais surtout prendre bien ses distances avec lui lorsque l'on est dans la majorité demeure un facteur-clé de succès très efficace dans l'opinion publique", analyse Gaël Sliman, directeur général adjoint de BVA. Mais moins efficace pour garder sa place au gouvernement.
Eric Nunès

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