Ils ne se sont pas entre-tués! Les «observateurs» en seront presque déçus tant ces primaires ont nourri l’attente, un peu morbide, de voir les prétendants se déchirer en direct. N’était-ce pas le piège le plus dangereux de ce numéro démocratique qui, défiant la nature gauloise de nos débats publics, risquait de dériver vers les jeux du cirque socialiste? Mais non, décidément, ils ne sont pas tombés dedans et sans doute n’y tomberont-ils pas davantage lors du troisième débat.
On a bien senti, à l’odeur de poudre diffusée par quelques escarmouches, la tentation d’en découdre entre camarades. Mais, pour la deuxième fois, les rivaux se sont bien tenus. Le goût de la victoire, et les promesses de succès en 2012, auraient pu désinhiber l’agressivité (ça s’est déjà vu...) Ils l’ont, au contraire, canalisée. Ségolène titillant son ex, Arnaud moquant Manuel, Martine reprenant François et vice-versa, les exaspérations ont été contenues jusqu’au bout même si les quelques sous-entendus laissaient planer de temps à autre des désaccords assez nets. Cette paix armée est en soi un bilan... Un petit exploit qu’on s’est bien gardé d’entailler à coup d’amour-propre. Pas question d’ouvrir des plaies sur le plateau clinique de LCI!
L’inconvénient de tant de retenue, c’est la logique du plus petit dénominateur commun. Tant d’énergie pour produire avec soulagement le constat qu’ils et elles étaient «tous d’accord» pour «moins taxer le travail», pour faire de «la jeunesse une priorité absolue, pour traiter l’immigration clandestine «au cas par cas, avec humanité», etc: est-il besoin de préciser que ce 18-20 heures ne fut pas ébouriffant, ni bouleversifiant?
Les uns et les autres ont déroulé leurs propositions comme des tapis sans qu’on discerne dans cet étalage la trame d’une gouvernance de gauche dans une réalité du capitalisme qui ne l’est pas. A un moment, on a bien cru qu’on était revenu aux temps glorieux d’un dirigisme d’État pouvant manier l’interdiction et l’interventionnisme comme avant jusqu’à ce que «la bande des six» prenne conscience, sous l’œil des caméras, des dégâts sur sa crédibilité que pouvaient laisser de tels argumentaires.
Dès lors l’aimable conversation a flâné des vertus comparées des emplois aidés à la célébration des PME sans parvenir à dégager vraiment un socle de gouvernance commun à toutes les sensibilités de la gauche. Dans ce patchwork un peu laborieux, Ségolène Royal a apporté de la couleur vive (un peu trop parfois), Arnaud Montebourg un fil théâtral pour une fois mesuré, Manuel Valls quelques mailles bien identifiables, Martine Aubry des contrastes de tons. Quant à François Hollande, synthétiseur accompli, il s’est contenté du terne du favori qui veut rester discret. Un peu trop professeur. Un brin phraseur. Pour tout dire, un peu creux. La peur de gagner, déjà?
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