TOUT EST DIT

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dimanche 10 avril 2011

Dans la jungle des lobbies

Le récent scandale impliquant des eurodéputés qui s’étaient laissés corrompre par des journalistes se faisant passer pour des lobbyistes a levé le voile sur les rapports souvent troubles entre les représentants des groupes d’intérêts et les institutions européennes. 

Le Parlement européen (PE) est de nouveau frappé par des scandales de corruption et la question du lobbying refait surface après la démission de plusieurs euro-parlementaires tombés dans le piège tendu par des journalistes du Sunday Times déguisés en lobbyistes.
Quant au président du PE, Jerzy Buzek, il a pour sa part prôné "la tolérance zéro" envers toute forme de corruption. Les analystes européens soutiennent cependant qu’en réalité le PE est désarmé – il peut s’indigner et démarrer une enquête interne, mais ne dispose d’aucun moyen de  faire partir "les moutons noirs".
La nervosité n’a cessé de croître après la publication de l’hebdomadaire britannique, qui a dévoilé comment ces députés ont cédé à la tentation, acceptant de l’argent en échange du soutien des certains amendements. Scandale de corruption ? Scandale de lobbying ? Scandale médiatique ? Quoiqu’il en soit, l’enquête de Sunday Times discrédite l’institution toute entière.

Les lobbies font le siège des institutions européennes

En matière de lobby, l'UE fait l’objet d’une attention spéciale, car le droit communautaire prime sur le droit national dans la quasi-totalité des cas et parce que les pouvoirs ne sont concentrés qu'à quelques endroits bien définis. Et les représentants des groupes d’intérêts ont très bien compris que Bruxelles est "l'épicentre" pour faire du lobbying.
Ici pullulent des milliers de lobbyistes, des centaines de sociétés de relations publiques et cabinets d’avocats, une douzaine de think-thanks et des "bureaux d’affaires européennes" de plusieurs centaines d'entreprises. La société civile et les groupes écologistes ne font pas le poids devant l’ampleur des moyens financiers et logistiques développés par l’industrie. Par exemple, la Fédération européenne de l’industrie chimique (CEFIC) dispose de plus de lobbyistes que toutes les organisations de protection de l’environnement réunies.
La Commission européenne, qui détient le pouvoir exclusif de proposer et de développer les nouvelles lois européennes, est l'une des cibles prioritaires. Mais l’intérêt des lobbyistes vis-à-vis du Parlement européen a augmenté proportionnellement à l'accroissement de son pouvoir (dû au traité de Lisbonne). Ce dernier peut désormais approuver, bloquer ou  modifier les propositions de la communauté européenne et ses députés sont devenus des cibles de choix.
L'UE intervient désormais dans des domaines de plus en plus techniques, qui nécessitent souvent une expertise. Au lieu de réaliser sa propre expertise, la Commission a laissé le champ libre  aux lobbyistes, qui sont devenus des interlocuteurs naturels des décisionnaires. Les groupes d’intérêt disposent aujourd’hui d’un accès privilégié aux locaux des institutions européennes.
Et, loin d’œuvrer pour l’intérêt général, ils se servent des intérêts privés et contribuent à façonner la législation européenne dans un sens favorable aux  grandes compagnies qui les rémunèrent. Les groupes de pression cachent soigneusement  leurs vraies motivations, en créant des sociétés –écran et en prétendant travailler pour des ONG ou financer des "experts indépendants".
L’influence des groupes d'intérêts qui opèrent dans l'ombre ne semble pas trop inquiéter l’UE. Bruxelles prospère sur la base de l’industrie de l’influence, respire les jeux de pouvoir des groupes de pression. Fonctionnaires, diplomates, lobbyistes et journalistes se rencontrent du matin au soir, déjeunent dans le quartier Europe, dînent dans le quartier des Sablons, participent aux cocktails, socialisent le soir et pendant les week-ends, unis dans un même club où l'on évoque une noble cause – l’Europe et son bien-être !

Il n'y a qu'un pas de commissaire à lobbyiste

Les cas d'ex-commissaires qui vendent leurs services et leur influence aux lobbys, provoquant des grands conflits d’intérêts qui corrompent finalement l’exécutif européen, se multiplient. Ce qui ennuie Bruxelles. Des 13 commissaires qui ont quitté la CE en février 2010, six travaillent désormais dans le secteur privé, recevant néanmoins des allocations européennes. Comme par hasard, tous ont rejoint des groupes privés dont ils ont déjà soutenu les intérêts durant leur mandat.
Le cas le plus célèbre est celui du social-démocrate Günter Verheugen. Commissaire chargé de l'Entreprise et de l'Industrie (2004-2010), il a été critiqué pour avoir favorisé de grandes sociétés au détriment des préoccupations sociales et d’environnement. Peu après avoir fini son mandat, il a créé son propre cabinet de consultance en lobbying, European Experience Company.
Son agence aide "les hauts représentants des institutions publiques et privées" dans leur action de lobbying auprès de l'UE. La compagnie facture "les recommandations stratégiques dans le domaine de la politique UE". Selon la députée allemande Inge Grasle (CDU), "toute personne qui dispose d’argent peut acheter l’accès de Verheugen aux institutions européennes".
Bien sûr, le Comité d’éthique de la Commission s’est penchée sur le cas, sans rien trouver à lui reprocher. D’ailleurs ce comité accorde systématiquement des exceptions aux anciens commissaires qui, officiellement, doivent attendre un an avant de s’habiller en lobbyistes.

Un code de conduite

La représentation des intérêts fait partie de la légitimité d’un état démocratique. Dans le cadre des efforts qu’elle mène afin de gagner la confiance du public, l’UE a établi un registre facultatif et se prépare à adopter un code de conduite afin d’assurer une transparence des représentations des intérêts. Selon l’ONG Alter-EU, qui milite pour la transparence des pratiques des lobbyistes, seul 40% des lobbies se sont inscrits à ce registre.


Parlement européen

Les eurodéputés s’accrochent à leurs privilèges

“Les eurodéputés du PP et du PSOE votent conjointement pour continuer à voyager en première classe", titre El Mundo,au lendemain du vote au Parlement européen sur les mesures d´ajustement budgétaire prévues pour 2012. "Comme la majorité de leurs collègues, ils ont aussi rejetté le gel des salaires ou le contrôle des indemnités", souligne le quotidien, tout en votant une augmentation du budget du Parlement de 2,3% en 2012. "Le vol d´un eurodéputé espagnol: 1 514 euros en classe affaires, 561 en classe touristes", rapporte El Mundo, pour qui cette affaire rend compréhensible que “la classe politique soit la troisième préoccupation" des Espagnols, selon le dernier sondage du CIS"honteuse et scandaleuse", conclut le quotidien. Après la publication de l´information sur le reseau Twitter et la polémique que celle-ci a suscitée, les socialistes ont annoncé le revirement de leur vote, optant pour l´abstention. (Centre de recherches sociologiques). Une attitude

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